Pas dormir
6.5
Pas dormir

livre de Marie Darrieussecq (2021)

Tout est préférable à cet éveil permanent, à cette absence criminelle de l’oubli

Marie ne dort pas. Elle a tout essayé : la méditation, les tisanes, l’hypnose, le sport, l’alcool, les somnifères… Mais rien n’y fait, le sommeil a quitté Marie.




Entre récit autobiographique et essai méditatif, l'auteur nous invite dans son intimité, nous fait découvrir son quotidien et ses nuits sans fin. Elle invoque tous les artistes insomniaques, Proust, Kafka, Duras et tant d’autres encore.


“Tout est préférable à cet éveil permanent, à cette absence criminelle de l’oubli.”, disait Emile Ciora. Et je suis bien d’accord. Quoi de pire que de rester allongé dans son lit, la tête en effervescence et le corps fiévreux, dans l’attente du repos qui ne viendra pas ?


Étant moi-même soumise régulièrement au supplice de l’insomnie, ce livre m’a interpellée. Je pensais y trouver la recette du sommeil, j’y ai découvert sa fatalité : rien n’empêche l’insomniaque de ne pas dormir.


Mais j’ai aussi beaucoup appris cette pratique supposément naturelle qu’est le sommeil. Les inégalités entre dormeurs et insomniaques, les techniques inutiles, voire dangereuses pour rejoindre le premier camp. Un camp qui a souvent tendance à penser que l’insomnie est un caprice que le veilleur s’impose à lui-même, comme si le fait de le constater allait l’aider à s’endormir. Mais le sommeil, ce n’est pas la pleine conscience. C’est bien plus complexe.


Et enfin, j’ai découvert ce monde parallèle et rassurant d’artistes torturés, d’intellectuels éveillés. On est jamais le seul à ne pas dormir. Lorsque la lumière s’éteint et que l’heure tourne, 1h, 2h, 3h, 4h, que le sommeil ne vient pas, une multitude d’autres individus attend avec nous. Et c’est ce qui fait la beauté de ce roman, qui parlera certes beaucoup plus aux insomniaques qu’aux gros dormeurs : la solidarité, l’accord tacite entre inconnus, qui aide à décomplexer le sommeil, et in fine, à mieux dormir.


Retrouvez toutes mes chroniques sur ma page Instagram.

ElodieAngiolini
7
Écrit par

Créée

le 15 nov. 2021

Critique lue 171 fois

1 j'aime

Critique lue 171 fois

1

D'autres avis sur Pas dormir

Pas dormir
ElodieAngiolini
7

Tout est préférable à cet éveil permanent, à cette absence criminelle de l’oubli

Marie ne dort pas. Elle a tout essayé : la méditation, les tisanes, l’hypnose, le sport, l’alcool, les somnifères… Mais rien n’y fait, le sommeil a quitté Marie. Entre récit autobiographique et essai...

le 15 nov. 2021

1 j'aime

Du même critique

Enfant de salaud
ElodieAngiolini
6

"Mon père, le premier de mes traîtres"

1987, Lyon. 40 ans après l'holocauste débute le procès de Klaus Barbie. Sorj Chalandon couvre l’événement pour Libération et reçoit le prix Albert Londres pour son travail. 30 ans plus tard, il...

le 28 oct. 2021

2 j'aime

1

Chems
ElodieAngiolini
7

Chemsex, la quintessence de la partouze

Chemsex. Contraction de chemical sex, ces marathons sexuels sous stupéfiants sont considérés comme le “fléau des pédés”. Le principe ? pimenter les partouzes en utilisant des substances psychoactives...

le 5 mars 2021

2 j'aime

L'Art de la joie
ElodieAngiolini
8

Dans l’anxiété de vivre j’ai laissé filer mon esprit trop vite

Modesta naît le 1er janvier 1900 en Sicile, au sein d’une famille miséreuse et toxique. Elle raconte son ascension sociale fulgurante, de jeune fille pauvre à femme libre, indépendante, jusqu’à la...

le 22 juin 2022

1 j'aime