Histoires croisées d’Issa & Lucas, réfugié érythréen amnésique dans la jungle de Calais et gendarme calaisien d’origine mahoraise. Pas facile de s’en sortir avec ce prémisse et pourtant.. Magic Michalik opère encore. Commençons par la forme : la mise en scène est sublime, toute en suggestion et comme d’habitude on voit le film derrière, dans le « montage », dans la scénographie, dans les dialogues, la direction. Comme un prestidigitateur, il détourne ton regard 2 secondes et paf ! ellipse, changement de costume, tout en restant complètement lisible. Le gars se balade. Pour la première fois (il me semble), il fait usage de la vidéo en fond et c’est très heureux : certains effets comme l’incendie du camp ou le TGV Paris-Calais sont spectaculaires.
Sur le fond, c’est fort aussi, sans être absolument brillant. Difficile de travailler ce sujet sans tomber dans les clichés, ou la niaiserie, surtout quand on veut écrire une histoire qui reste feel good. Alors oui, le lieutenant de gendarmerie bas du front, le colonel raciste, la journaliste de gauche indignée, la bibliothécaire impliquée, la chargée d’insertion volontaire mais limitée, le Tamoul entrepreneur, le Syrien prof de littérature, c’est un peu déjà vu, mais, personnellement, je m'embarque, suis et admire l’auteur dans son courage de s’en battre les yeuks de faire du cliché, tant que c’est au service d’une belle histoire, d’un message d'amour. C’est émouvant, c’est drôle, c’est convainquant et le twist final m’a quand même mis sur le cul, malgré ses incohérences. La fin est bouclée rapidement et plutôt faible par rapport au reste mais je l’excuse car je ne vois pas comment on pourrait la réussir.
A voir, à montrer, he’s done it again.
Vu le 21/03/2024 au Théâtre de la Renaissance avec Kevin Razy (???)