Des années que je repoussais le moment de lire ce grand classique qui, de mon point de vue, sentait par trop le conte philosophique et la romance naïve.
"Paul et Virginie" est bien les deux à la fois et pourtant - au temps pour mes préjugés - j'ai beaucoup apprécié ma lecture. Est-ce parce que c'est l'été et que la formidable évocation de la nature de l'Ile-de-France (actuelle Ile Maurice) par Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre m'a fait voyager ? Peut-être. Il n'en demeure pas moins que l'auteur a offert à la Littérature un roman beau et poignant, une histoire d'amour pure et inspirante.
Le récit se déroule en Ile-de-France, à Pamplemousse. Deux Françaises, Marguerite et Madame de la Tour, respectivement mères de Paul et de Virginie, ont été reniées par leur famille pour "inconduite" ou "infortune" et ont quitté l'Hexagone pour cette lointaine colonie. Leurs enfants illégitimes sont à l'image de l'enfant sauvage de Rousseau et ils vivent aussi libres que des indigènes. Elevés ensemble, Paul et Virginie développent une complicité certes naturelle mais extraordinaire au regard de la société d'alors ; une amitié vouée à se transformer à l'adolescence en un sentiment plus profond qui ne demande qu'à s'épanouir comme une fleur de papayer. Toutefois, c'est sans compter les moeurs et les ambitions cachées du XVIIIème siècle qui s'entendront pour massacrer l'innocence. Ajoutez là-dessus les périls de la mer tropicale et vous obtenez un grand drame.
"Paul et Virginie" est certes un roman moral qui glorifie la vertu et la chasteté mais, pour moi, c'est avant tout une peinture sociétale servant de cadre à une drame sentimental que n'aurait pas boudé le grand Shakespeare. A final, j'ai passé un bon et beau moment en compagnie des protagonistes et bien que le drame final se devine avant le dénouement, cela ne retire rien à la beauté de la langue, des descriptions et de l'étude minutieuse des personnalités.