"Le Mac est le salopard le plus seul de la terre, sa vie intérieur l'occupe entièrement, car il passe tout son temps a planifier, a réfléchir, a trouver de nouveaux moyens pour faire travailler ses filles et faire rentrer du fric"
Slim nous fait parcourir les États-Unis des années 30/40 avec une immersion diabolique qui nous plonge dans l'univers des escrocs, arnaqueurs, voleurs et macs en tout genre.
On sent l'odeur des prostituées et leur parfum bon marché à travers chaque page qui ruisselle d'anecdotes plus dures les unes que les autres.
On écume les bars avec lui, on se pavane en Cadillac le long des rues mal famées, on vit l'enfermement en prison et on se drogue à ses côtés dans sa chambre d'hôtel où il restait parfois planqué des mois entiers après avoir fait un mauvais coup.
Nous faisons aussi la rencontre d'une dizaine de personnages qu'il croise au fil de sa vie, en prison, dans des bars ou dans la rue, du simple escroc fauché (Party time), avec qui il essaye d'arnaquer de pauvres types en se déguisant en pute caché dans des ruelles sombre, au mac blindé et endurci (Sweet Jones) qui lui apprendra toutes les ficelles du métier et comment tenir ses filles en les manipulant le mieux possible :
"Slim, tu dois savoir qu'une jolie garce noire, c'est comme une pute blanche. Quand l'une ou l'autre entrent dans une écurie, c'est pour la foutre en l'air et laisser le mac sur le cul en ayant fait partir toutes ses filles. Il faut les faire tapiner dur et vite pour les obliger a ramener un maximum de fric le plus vite possible. Slim, retiens bien ça, être mac, ça n'a rien a voir avec l'amour, les filles, tiens les a distance, fais toi désirer et gare ta queue. Le connard qui croit qu'une pute peut tomber amoureuse de lui, il aurait mieux fait de rester bien au chaud dans le ventre de sa mère"
Slim nous dégoûte par ses actes odieux, par la façon dont il traite les femmes, mais il nous attendrit quelques pages plus tard par ses galères et les pièges que la rue, et que cette société blanche lui tend sans arrêt.
Certaines histoires sont tellement folles qu'on peut avoir du mal à les croire parfois, comme celle qui lui vaudra son surnom, ou un homme tira un coup de feu dans un bar, la balle retira le chapeau de la tête de Slim, mais celui ci, tellement givré par la coke ne bougera pas d'un poil et restera de marbre, aussi glacé qu'un Iceberg.
D'autres sont au contraire tellement précises et criantes de vérité pour quelqu'un qui connaît un minimum la rue qu'elles ne peuvent avoir été inventées.
Au milieu de tout ça, Slim décrit aussi sa relation touchante avec sa mère, avec ses hauts et ses bas, la seule personne qui aura vraiment compté du début à la fin de sa vie.
Un livre qui marque par sa dureté et son réalisme cru. L'une des œuvres les plus trash que j'ai pu explorer, mais qui se distingue également par la manière dont elle peut inspirer et motiver.
Récit particulièrement fascinant par la manière dont Iceberg Slim exploite son intelligence et sa ruse pour survivre dans cette société qui ne veut pas de lui, mais aussi pour comprendre et décrypter les comportements humains, en particulier dans le milieu impitoyable de la rue.
Après avoir vécu une vie de fou furieux dégénéré, Iceberg Slim utilisera la même intelligence qui lui a servi à faire le mal pour faire le bien, en réussissant finalement à voir le monde d'un autre œil grâce aux innombrables signaux et leçons que la vie a pu lui apporter au fil des années et en réussissant a les interpréter de la bonne manière, ce qui fait de ce livre un chef-d'œuvre de repentance.
Car après tout, pourquoi un Iceberg n'aurait t'il pas le cœur chaud ?