Quand je pense à Arthur Rimbaud, le premier mot qui me vient est liberté. Puis un autre mot arrive très vite, il s'agit de poésie. En effet, qu'est-ce qui est plus poétique et plus libre qu'un homme qui écrit sans même savoir qu'il sera publié ? Rimbaud n'a pas écrit pour que ses pensées restent. Il n'a jamais prévu, ou alors dans ses rêves, qu'un jour il serait lu par beaucoup. Il a vécu sa vie sans se soucier de ces questions. Il a écrit. C'est tout.
Il a vécu aussi.
"Je ne parlerai pas, je ne penserai rien
Mais un amour immense entrera dans mon âme :
Et j'irai loin, bien loin comme un bohémien,
Par la Nature, - heureux comme avec une femme !"
Voilà ce qu'il dit dans "Sensation" qui sera repris dans "Les soirs bleus". C'est un enfant qui dit toute son ambition : vivre libre et heureux. Bah, il l'a fait !
Même si bien sûr, c'est plus facile d'être libre que d'être heureux.
Et cela Rimbaud nous le dit aussi, quand il évoque dans "Le cœur volé" un viol (le sien ?). Il nous amène alors dans les ressentis, terribles ressentis, d'une personne victime de ce crime. Selon certains observateurs, et on le comprend vite en le lisant, il faut remplacer "cœur" par "cul" pour entrevoir le drame vécu par Rimbaud.
Et puis, au cours du recueil, s'enchaînent les prises de liberté d'un gamin qui vit.
Plus loin on retrouve des poèmes plus matures, mais pas moins forts, comme "Fêtes de la patience". Et la définition que nous apporte Rimbaud de l'éternité :
" Elle est retrouvée.
Quoi ? - L'Eternité.
C'est la mer allée
Avec le soleil."
Rimbaud finalement cherche les limites. Et quelles sont les limites de l'eau, de l'horizon, du soleil ? Et quelles sont les limites de l'amour, de la passion, du danger ?
Biensur il y a aussi les classiques. "Le dormeur du val" et "Le bateau ivre" et le mythique " Je est un autre". Tout ça rend l'œuvre de Rimbaud complète, totale. C'est un gamin, mais il a déjà tout dit.
Alors comment faire autrement que de se taire tout le reste de sa vie ?