Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier par François CONSTANT
Curieuse écriture que celle de Patrick MODIANO. Étrange et belle ! Dans son roman « Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier » (Ed . : Gallimard, 2014), l’auteur pose ses phrases sur le livre comme un peintre poserait ses points de couleurs sur sa toile. Tout en nostalgies juxtaposées, en mélancolies teintées d’inquiétudes, en recherches confuses d’une pensée qui existe déjà mais doit encore naître au jour, celui du jour d’aujourd’hui.
Jean Daragne, le personnage principal de ce roman va rencontrer des personnes qu’il connaît à peine, ou même pas du tout. Et, un peu à cause d’elles mais surtout bien au-delà de celles-ci, il va voyager à la poursuite d’un passé que le temps a enfouis dans l’oubli sans jamais tout à fait l’estomper.
Et si le lecteur devine que l’image finale existe, il ne peut de suite la saisir. Un peu comme lors de la réalisation d’un puzzle dont on n’aurait pas mémorisé au préalable l’image-modèle à laquelle il faut aboutir. Chaque phrase, chaque idée, chaque tranche de vie du récit prend peu à peu son sens en trouvant sa place à côté d’autres phrases, d’autres idées, d’autres tranches du roman. C’est là la puissance d’écriture de Patrick MODIANO. Il n’y a pas d’action dans ce récit, juste le lent et fascinant effet d'un bain révélateur qui peu à peu fait apparaître l'image qui a été "mise en boîte" mais n'est pas encore visible.
Ce n’est qu’au terme du roman que le lecteur capte enfin la puissance d’évocation de cette image recomposée par Jean Daragne, le héros, celle d’un enfant qui, devenu adulte, se retrouve et se comprend. Vraiment, un bon moment de lecture !