Une nuit au musée.
J'aimerais avant ma critique, partager avec vous un article paru ce 18 août sur le site "Actualitté": " La grande vague de censure américaine ne faiblit pas...au Texas, l'adaptation en BD du journal...
le 23 août 2022
5 j'aime
3
Le Musée Anne Frank d’Amsterdam, l’Annexe, le lieu de vie clandestin où a vécu la famille de la jeune déportée avant d’être envoyée en camp de concentration en 1944, est devenu le temps d’une nuit, le lieu d’inspiration de Lola Lafon pour l’écriture d’un livre dont le projet devenu obsessionnel est né d’un rêve : « son nom s’impose à la nuit« . Magnifié par l’interprétation d’Irène Jacob dans sa version audio, cet essai rend un bouleversant hommage aux absents.
La jeune fille, que tout le monde connaît tellement qu’il n’en sait pas grand-chose, le destin de l’adolescente enfermée pour ne pas mourir et dont le journal intime devenu à la fois oeuvre littéraire d’une autrice prodige et mémoire du monde, résonne avec un évènement intime de la vie de Lola Lafon dont elle n’a pas encore conscience. Quelque chose la pousse à tenter l’expérience, cela a à voir, lui semble t-il avec le passé de sa propre famille. Alors que le sujet a été scrupuleusement évité par ses parents d’origine juive, Lola Lafon cherche à comprendre à travers la vie d’Anne Franck, l’histoire de ses ancêtres. Sa propre mère se cachait elle aussi lorsqu’elle était enfant pour échapper à la guerre et son grand-père est un rescapé d’Auschwitz. Ada sa grand-mère qui a appris le français sur le tard et lui a transmis sa passion des mots, lui a offert une médaille, un portrait d’Anne Franck, en lui recommandant de la garder à vie et de ne jamais oublier.
Des années plus tard, Lola Lafon franchit la porte de l’Annexe, une nuit d’août 2021 et « défile » devant l’absence de la famille Franck, visite chacune des pièces exigües où ils ont vécu durant plusieurs mois dans la crainte de la menace nazie. Respirer, écouter, imaginer, vivre la vie d’Anne Franck est un peu comme lui redonner vie. Lola Lafon réalise une approche différente et délicate d’Anne Franck, cette jeune fille que tout le monde connaît mais que personne n’entend. Comment l’appeler, son célèbre journal, que tous les écoliers ont lu et dont aucun adulte ne se souvient vraiment? Est-ce un témoignage, un testament, une œuvre? Ce jourrnal a été censuré, remanié, manipulé, scénarisé par des producteurs hollywoodiens négationnistes, avant d’être, enfin, considéré comme une véritable oeuvre littéraire et perçu à sa juste valeur.
Cette rencontre avec le fantôme d’Anne Franck convoque donc d’autres fantômes au fil de ce magnifique récit, qui devient intimiste au fil des pages. Lola Lafon nous livre une autre histoire, celle d’une rencontre adolescente, bouleversante, qui nous rappelle sans équivoque l’absurdité des guerres, l’aberration des génocides, leurs inévitables répercutions sur les populations innocentes et leurs inéluctables répétitions. Il est rare que je lise un récit d’une telle profondeur, où l’intensité des mots côtoie à ce point celle des évènements. La puissante sincèrité de ce récit intime et la façon brillante et touchante dont il se mêle à l’Histoire le rendent indispensable dans toute bibliothèque.
Je remercie chaleureusement les Editions Audiolib via Netgalley pour cette proposition.
Créée
le 27 mars 2023
Critique lue 29 fois
1 j'aime
D'autres avis sur Quand tu écouteras cette chanson
J'aimerais avant ma critique, partager avec vous un article paru ce 18 août sur le site "Actualitté": " La grande vague de censure américaine ne faiblit pas...au Texas, l'adaptation en BD du journal...
le 23 août 2022
5 j'aime
3
Avec délicatesse, Lola Lafon décortique l'image bien trop polie d'Anne Frank pour extraire d'elle ce que l'histoire tend à oublier. Elle pose la question de l'icône que l'on fige, en adoration, et...
Par
le 30 mai 2023
2 j'aime
Pour la collection « Ma nuit au Musée », Lola Lafon a choisit de répondre à l’invitation du Musée d’Anne Franck au bord du canal à Amsterdam et de séjourner une nuit dans l’Annexe où Anne et sa...
Par
le 8 sept. 2022
2 j'aime
Du même critique
Une jeune femme est retrouvée couverte de sang dans un chalet de montagne, à proximité d’un cadavre réduit en bouillie. La suspecte est atteinte d’amnésie. A son chevet, Camille Nijinski en charge de...
Par
le 20 juin 2022
5 j'aime
Je m’extirpe des pages de ce roman une nouvelle fois abasourdie par tant de talent: crier au génie ne me suffira pas cette fois à exprimer mon admiration hors norme pour cet auteur ! J’ai lu très...
Par
le 28 juil. 2020
5 j'aime
1
Plus les sujets sont sombres, plus il s’en sort haut-la-main. La barre est très haute, elle atteint des sommets puisque F. Thilliez s’attaque ici au sujet le plus énigmatique qu’il soit : la mort. La...
Par
le 7 août 2023
4 j'aime