Autant le dire de suite, Qui a peur de la mort ? est un roman qui secoue.
Excision, viol, meurtres de masses, épuration ethnique, racisme, il y a tout ça dans ce roman. Mais il n’y a pas que ça (heureusement). Égalité des sexes, émancipation sociale et sexuelle, amitié, amour et don de soi sont également au programme.
L’histoire se passe en Afrique, dans une ambiance post-apocalyptique volontairement floue au niveau des dates, dans un pays qui ne sera nommé qu’en toute fin d’ouvrage. La particularité de ce roman, c’est que malgré le côté post-apo du récit, nous sommes dans un pur roman de fantasy, où la magie est très présente.
L’héroïne, Onyesunwu (Qui a peur de la mort ? en langue igbo) est en effet une sorcière, et c’est son parcours que nous sommes invités à suivre. Enfant du viol, en but au racisme au sein de la société, elle va devoir surmonter ces obstacles pour avancer. Sa condition de métis d’abord, puis sa condition de femme, qui lui interdit (un temps) d’accéder à l’enseignement magique.
Mes connaissances en cultures africaines étant proche de zéro, je ne vais pas m’attarder (mais j’adorerais) sur le côté mystique du récit. On s’en doute compte-tenu de la thématique du roman, la magie est centrale dans le récit. Sorciers et sorcières sont présents en nombre dans le roman, les esprits et les créatures fantastiques aussi, mais je suis incapable de discerner ce qui relève de l’invention de Nnedi Okorafor ou de réelles traditions magiques ou mythologiques…
L’écriture de Nnedi Okorafor est percutante, sans concessions, et ne cache rien des errements de son héroïne, des difficultés (même et surtout intimes) qu’elle rencontre, et ça fait du bien ! On parle règles, on parle de sexualité et d’orgasme, on parle des choses de la vie sans fard.
C’est un roman très juste, qui nous montre une jeune fille aux prises avec le poids de la tradition, les préjugés (racistes et sexistes), son propre corps parfois, et nous rappelle (si besoin en était), que l’égalité des sexes ne devrait pas être une question de société, mais une évidence.
Plusieurs scènes sont dures, à la limite de l’insoutenable, mais elles participent de la force du roman. Je ne pense pas que l’on puisse ressortir indemne de sa lecture. J’ose espérer qu’on ne peut pas non plus en ressortir déçu.
Qui a peur de la mort ? est un beau roman, un texte émouvant et fort. Lisez-le.