Quand un grand écrivain regarde la vie dans un hypermarché Auchan, cela donne un livre aussi beau que son titre.
Vous me direz que c'est étrange d'employer le mot "beau" pour évoquer cet ouvrage paru dans une collection à caractère sociologique. C'est oublier que le regard d'Annie Ernaux est on ne peut plus subtil, humain et qu'il est doublé d'une écriture limpide, directe et belle. Au final cela donne un livre d'une parfaite concision (72 pages), qui vous brosse un portrait lumineux et sans concession de ce temple de la consommation.
En cliente ordinaire, régulière et fidèle, Annie Ernaux observe ce lieu de promiscuité subi, le décrypte, le dissèque avec toute sa subjectivité, ne faisant donc pas un travail de sociologue. Elle s'implique personnellement dans ce lieu, s'y inscrit pleinement en tant que femme d'abord, subissant les assauts sexistes de ce lieu où l'acte d'achat est pensé plus au féminin. Ecoeurée par l'extrême séparation des genres des rayons des jouets de Noël qui façonne les inconscients tout autant que par la répartition des rayons en zone de marquage des richesses, elle dissèque un par un tous les rouages de ces usines à consommer. Entre la décoration clinquante et joyeuse ou les panneaux fluorescents qui donnent l'impression que le magasin est généreux en bradant ses produits, l'écrivain note, analyse, pour mieux comprendre tous les enjeux économiques mais aussi humains qui règnent en ces lieux.
Avec un écriture simple, mais où chaque mot fait mouche, Annie Ernaux exprime librement et magnifiquement toute une myriade de sensations que tout un chacun a éprouvé lorsqu'il s'est trouvé à pousser un caddie....
La fin sur le blog
pilyen
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 30 mars 2014

Critique lue 1.2K fois

7 j'aime

pilyen

Écrit par

Critique lue 1.2K fois

7

D'autres avis sur Regarde les lumières, mon amour

Regarde les lumières, mon amour
pilyen
10

A mettre en tête de gondole !

Quand un grand écrivain regarde la vie dans un hypermarché Auchan, cela donne un livre aussi beau que son titre. Vous me direz que c'est étrange d'employer le mot "beau" pour évoquer cet ouvrage paru...

le 30 mars 2014

7 j'aime

Regarde les lumières, mon amour
Ponchiot
4

Un problème de positionnement

Je suis totalement en phase avec le projet "Raconter la vie", exposé par Rosanvallon dans le parlement des invisibles, visant à donner la parole et laisser s'exprimer des points de vue et des...

le 17 avr. 2015

4 j'aime

Regarde les lumières, mon amour
Nadouch03
6

Le pays où la vie est chère...

Sous la forme d'un journal, Annie Ernaux consigne ses remarques sur le magasin Auchan qu'elle fréquente. L'occasion de démasquer et mettre en mots les travers de notre société de consommation, les...

le 8 déc. 2014

2 j'aime

Du même critique

Habibi
pilyen
4

Bibi n'a pas aimé

Il y a des jours où j'ai honte, honte d'être incapable d'apprécier ce qui est considéré comme un chef d'oeuvre par le commun des mortels. A commencer par mon libraire spécialisé BD qui m'a remis...

le 1 janv. 2012

35 j'aime

7

Grand Central
pilyen
3

Grand navet

J'ai vu le chef d'oeuvre de la semaine selon les critiques. Hé bien, ils se sont trompés, c'est un navet et un beau ! Cette fois-ci, ils ont poussé le bouchon tellement loin qu'ils risquent d'être...

le 29 août 2013

27 j'aime

18

Les Fantômes d'Ismaël
pilyen
3

Parlez-vous le Desplechin ?

Je le dis d'emblée, je n'ai jamais été fan du cinéma de Mr Desplechin. "Les fantômes d'Ismaël" confirment que je ne parle pas et ne parlerai jamais le "Desplechin" comme se plaît à dire le...

le 18 mai 2017

24 j'aime

1