Une lecture qui remue, comment pourrait-il en être autrement ? Quand les sujets abordés répondent aux enjeux de la vie : mort violente, deuil de l'enfant, don d'organes et transplantation, process médicaux aussi fascinants que terrifiants assumés par les femmes et des hommes véritables missionnaires de la science.


"Réparer les vivants" est un roman largement plébiscité par le public et la critique. Peu de pages, beaucoup d'intensité. Deux parties distinctes et pourtant aussi indissociables que le donateur et le receveur, que le mort et le vivant, le vivant par le mort.


Pour commencer, Simon a vingt ans et la vie devant lui. Sa courte vie passionnée s'achève brutalement à cause d'un détail à la con : le port d'une ceinture de sécurité. L'absence de ce mince baudrier de fibres tissées autour de son thorax entraîne l'écroulement de son monde et de celui de sa famille, de ses amis, de ses proches. C'est la partie des morts, Maylis de Kérangal traite de l'annonce, de la perte, du deuil, des non-choix, c'est évidemment poignant, comment pourrait-il en être autrement ?


Pour poursuivre, Claire est une quinquagénaire au coeur nécrosé, en attente d'un miracle qui paradoxalement ne peut venir que de la mort : un coeur sain. C'est la partie des vivants, Maylis de Kérangal aborde l'attente, la peur, le doute, l'espoir, le risque, les non-choix, c'est évidemment poignant, comment pourrait-il en être autrement ?


Reliant ces deux parties d'une même histoire, d'un même corps, évolue tout un personnel, des professionnels ayant chacun son parcours fait de réussites ou d'échecs, tous unis et tendus dans un but ultime : soigner, sauver, réparer les vivants. C'est juste beau et c'est ce qui m'a peut-être le plus touchée, en tout cas le plus absorbée dans le récit.


"Réparer les vivants" est un texte dur, lourd, grave, triste qui fait certes s'interroger mais qui donne un gros coup au moral. Il offre néanmoins l'avantage de fournir un éclairage important sur un sujet mal connu, peu débattu, un sujet quasi tabou. C'est bien dommage que j'ai détesté le style de Maylis de Kérangal.


Un style qui dissèque au bistouri jusqu'au vertige et la nausée, qui cherche à mettre de la poésie dans des petits riens pas poétiques, qui cherche à concurrencer Proust pour la longueur des phrases qui se terminent en logorrhée. Un style que j'ai trouvé verbeux, oiseux, un rien racoleur, manquant de finesse tout en voulant jouer la délicatesse, bref manquant terriblement de naturel et versant non pas dans le sublime mais dans le pathos.


Ce que je retiendrai de "Réparer les vivants", c'est surtout l'urgence de l'action, l'impossible distorsion de temps entre la nécessité de ménager d'un côté les endeuillés et celle de sauver ceux qui peuvent encore l'être, cette insoutenable violence de la décision, de l'ablation, de la conscience de la perte mise sur pause le temps de "sauver les meubles" quand ces derniers peuvent servir à meubler d'autres êtres, d'autres vies. Complexité et juxtaposition des sujets, d'où l'intensité, ni le temps de penser ni celui de s'épancher.


"Réparer les vivants", c'est enfin une densité de faits, d'émotions et d'actions en seulement une journée et c'est finalement ça qui est vraiment marquant.

Gwen21
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes 2021, Challenge MULTI-DEFIS 2021, Challenge ATOUT PRIX 2021 et Challenge PLUMES FEMININES 2021

Créée

le 23 janv. 2021

Critique lue 66 fois

2 j'aime

Gwen21

Écrit par

Critique lue 66 fois

2

D'autres avis sur Réparer les vivants

Réparer les vivants
eloch
9

Avant l'aube

Plus on avance dans le livre, plus Simon s'éloigne de nous au travers de silhouettes habilement décrites et rendues vivantes par Maylis de Kerangal. Mais, paradoxalement, plus on s'en approche...

le 17 févr. 2014

23 j'aime

8

Réparer les vivants
BibliOrnitho
6

Critique de Réparer les vivants par BibliOrnitho

Simon est un jeune havrais de 19 ans. Passionné de surf, il n’hésite pas à se lever bien avant l’aube en ce matin de janvier pour aller rejoindre, avec deux amis, le littoral du Pays de Caux. Au menu...

le 17 juin 2014

22 j'aime

9

Réparer les vivants
marquise
6

Demain, dès l'aube...

J'avais vraiment très envie de lire Réparer les vivants. Le pitch me plaisait beaucoup, et j'ai immédiatement accroché au titre, que je trouve très beau. Je sors de ce livre plutôt confuse, mon...

le 19 mars 2014

15 j'aime

6

Du même critique

La Horde du contrevent
Gwen21
3

Critique de La Horde du contrevent par Gwen21

Comme je déteste interrompre une lecture avant le dénouement, c'est forcément un peu avec la mort dans l'âme que j'abandonne celle de "La Horde du Contrevent" à la page 491 (sur 701). Pourquoi...

le 1 janv. 2014

66 j'aime

24

La Nuit des temps
Gwen21
10

Critique de La Nuit des temps par Gwen21

Je viens d'achever la lecture de ce petit livre qu'on me décrivait comme l'un des dix livres de science-fiction à lire dans sa vie sous peine de mourir idiot. Je viens d'achever la lecture de ce...

le 15 sept. 2013

55 j'aime

10

La Disparition de Stephanie Mailer
Gwen21
1

Critique de La Disparition de Stephanie Mailer par Gwen21

Jusqu'à présent, de Joël Dicker, je ne connaissais rien ou plutôt pas grand chose, c'est-à-dire le nom de son premier roman "La vérité sur l'affaire Harry Quebert". Depuis cette parution...

le 22 mai 2018

33 j'aime

8