Roverandom
6.8
Roverandom

livre de J.R.R. Tolkien (1927)

Il ne serait pas mentir que de dire de Roverandom que ce n’est pas l’oeuvre la plus connue de Tolkien. Et pourtant, il y a un certain côté surprenant à cela. D’une part parce que le texte est fort court : 130 pages seulement. Autant dire que cela peut vite se lire, voir se dévorer tant le livre est plaisant. D’autre part, nous avons un texte ancien, écrit dans la seconde moitié des années 20, un texte dans lequel on peut déjà retrouver dans le fond et dans la forme certaines thématiques futures de Tolkien. Bien entendu, il ne faut pas surinterpréter ce point, mais pour autant, on aurait tord d’oublier tout côté historique à ce texte.


Roverandom amène donc une lecture double. D’un côté, l’archéologue tolkiennien va adorer découvrir la trace du maître dans une œuvre qui date d’avant l’établissement du légendaire comme cadre de ses récits (malgré que celui-ci soit alors en construction et que des références puissent se rendre présentes). De l’autre, nous avons ici un récit jeunesse assez bref, agréable, entre le roman et le conte franchement agréable.
Rover est un petit chiot tout banal qui, un jour, mord le pantalon d’un magicien. Aussitôt transformé en jouet, il va d’aventure en aventures, à travers la plage, la lune, l’océan, pour redevenir un vrai chien. Chaque étape est l’occasion de rencontrer un magicien, de se surprendre de la beauté du monde fantastique, de voir des créatures hors-normes et d’entendre des jeux de mots.


Le récit a une forme de malice, d’amusement, d’ironie du narrateur, qui ne sera pas sans rappeler The Hobbit. Le trait est cependant plus fort ici, rendant l’ensemble plus amusant. On comprend également que si le public ciblé est toujours des enfants, ils sont ici plus jeunes et Tolkien écrit donc en fonction du public premier.
Mais en allant plus loin dans cet aspect, Tolkien ajoute également une douceur, une tendresse. On ne peut qu’être touché par ce chiot. On ne peut que rire de ses tristes aventures et s’amuser de tout ce beau monde de magie. Je ne peux que reprendre les mots de David Barrett : « c'est une histoire démodée, mais qui garde toute sa fraîcheur aujourd'hui... qui semble prendre vie quand on la lit à haute voix à un enfant ». Je trouve ces mots parfaits. L’histoire est démodée car elle n’a rien de novatrice dans le fond, on en a déjà vu plusieurs dans cela, malgré le génie de Tolkien qu’on peut apprécier a posteriori en voyant des schémas se répéter. Mais en elle-même, l’histoire est presque usée, et pourtant de la plume de Tolkien se dégage une réelle fraicheur, une vraie douceur.


Je plains ceux qui n’aiment pas Roverandom, car ils ont perdu la douceur de l’enfance, sa gentille naïveté. Mais je les plains d’autant plus que jamais cette douceur, ni cette naïveté teintée de gentille, n’ont réellement disparu de l’oeuvre de Tolkien. Lire Roverandom c’est se rappeler que le légendaire de Tolkien est bien plus portée sur la magie dans ce qu’elle a de belle et de fantastique, que dans la sombre menace de Sauron.

mavhoc
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le 26 févr. 2020

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