«Sa Majesté des Mouches» n’est clairement pas ce que l’on attend d’un récit se destinant principalement aux enfants. L’histoire raconté par William Golding est cruelle, ironique et dérangeante, en plus d’être écrite dans un langage riche et soutenu, on est peu souvent habitué à voir des enfants, qui sont symboles de l'innocence, la naïveté, devenir de cruels barbares sans foi ni loi.
C'est un roman construit sur des oppositions. Tout d'abord dans le titre « Sa Majesté des Mouches » évoque à la fois la noblesse, la possession d'un royaume et de par les mouches, une connotation plus négative, le dégoût, la saleté, la mort.
Puis l'opposition entre la situation et le décor, entre la barbarie, la cruauté, le comportement sauvage et primitif des enfants et l'île paradisiaque, pleine de ressources, accueillante…
L'opposition entre le groupe de Jack et de Ralph est aussi à noter, qui est l'opposition entre la civilisation et la barbarie.
Le style est très sobre et fais passer les émotions de manière impeccable et la description de l'évolution des mentalités des personne isolés du mondes est décrite sensiblement. La représentation de libérations des enfants de l'autorité des adultes, pouvant faire ce qu'il désire, manger à telle heure, se baigner à telle heure, ne pas avoir à rentrer chez soi etc… Mais les problèmes s'installent il faut élire un chef ainsi que la prise de pouvoir, on fini par voir que ce n'est pas forcément les plus intelligent qui gouvernent.
j'ai beaucoup aimé la diversité des personnages, leurs caractères, leurs opinions, comment ils réagissaient.
J'ai aimé Ralph, avec sa tranquillité naturelle et tous ses efforts pour essayer de sauver ses compagnons, j'ai aimé le pauvre Porcinet qui faisait de son mieux pour ne pas être submergé par les autres, qui devenait ami avec Ralph , j'ai aimé Jack, ce vilain Jack qui m'a bien fait peur à la fin, mais dont je me suis bien moquée, j'ai aimé Simon, le petit Simon qui finalement était peut-être le plus intelligent de tous et qui ne méritait pas son sort.
C’est autant passionnant qu’effrayant, et on se laisse complètement envoûter par ce conte noir sous le soleil, glissant lentement et inéluctablement vers la folie sanguinolente…
Chaque événement, chaque personnage et chaque objet sont une allégorie, un symbole traitant de l’opposition entre la sauvagerie et la civilisation, entre la réflexion et l’instinct.
Le livre renvoie à un message bien noir qui est accentué à la fin et ne donne pas une once d'espoir. En effet, lorsque les marins retrouvent les gamins abandonnés sur leur île, ils vont quitter un enfer pour un autre….la guerre !
William Golding nous met en garde contre la pensée qui consiste à prétendre que ce qui est acquis en matière d’organisation humaine l’est pour toujours. Alors qu’ici on voit bien que le retour à la barbarie n’est pas à exclure, quand les circonstances s’y prêtent… et ce, malgré une excellente éducation comme c’est le cas de ces collégiens anglais, so british, au départ.
En l’occurrence, il ne suffit pas d’être né dans un monde dit civilisé (ici l’Angleterre) si l’on n’en a pas reçu les enseignements, car les « gènes de la civilisation » n’existent pas dans l'ADN humain, cela n’est en rien inné.
Lorsqu'on expérimente encore la peur du noir et des monstres dans la nuit, la cruauté quotidienne des cours de récréations, lorsqu'on peut pleinement empatir avec ces gamins abandonnés, on le dévore en tremblant, porté par l'aventure, sans tout comprendre peut-être mais sentant qu'il y a là quelque chose de terrible. Quelque chose qui relie les monstres au quotidien.
Adulte, on prétend l'avoir emporté sur les ombres, lorsque les cours de récré ne sont plus que de vieux et lointains souvenirs, on se laisse porter par la beauté des descriptions, la finesse psychologique redoutable avec laquelle l'auteur met en scène ce retour à l'état sauvage, la portée symbolique de l'histoire.
Si la compassion a remplacé l'empathie, le sort de ces gamins n'en est guère moins touchant. Et le propos n'a rien perdu de sa puissance, qui rappelle combien les monstres sont proches. Là, tout près, blottis au fond de nous et ne demandant qu'à sortir.
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