Le mal n'est jamais là où on pense...
Guillermo Del Toro livre ici un subtil conte de terreur avec ce métrage emplie de suspens psychologique.
Le film est profondément ancré dans l'histoire espagnole; ainsi, l'action se situe dans une école qui ressemble plus à un orphelinat pendant la guerre civile.
Le spectre de cette guerre plane sur les personnages tout le long du film.
J'ai été totalement subjuguée par cette intrigue brillante menée tambour battant par le maître du frisson. Nous serons très vite happés par les évènements de la guerre qui fait rage au-dehors et de la menace latente qui sévit au sein même de l'orphelinat.
Le ton pastel de la pellicule allié à l’impressionnant travail de photographie et de mise en scène offrent des images d’une grande qualité où les détails pullulent. L’ambiance est lourde, la peur de l’autorité est omniprésente voire étouffante, notamment celle de Jacinto, lui aussi autrefois confié au soin du couple et maintenant homme à tout faire à leur service.
L’intrigue se dévoile rapidement, mais non sans une certaine originalité, là où les autres métrages présentent le revenant en tant qu’entité maléfique, le choix est ici fait d’un être quémandant de l’aide, qui inspire plus de compassion que d’hostilité de la part du public qui nous emmène vers une révélation progressive d’un drame passé.
L’interprétation est de bonne facture, même les plus jeunes acteurs devant jouer l’inimitié puis l’amitié ne manquent pas de crédibilité. Les personnages sont extrêmement réfléchis, Guillermo del Toro ayant pour habitude de leurs rédiger une existence complète.
Par cette histoire forte et tragique, le réalisateur parvient à maintenir notre attention en éveil et préfère privilégier l'ambiance tendue et remplie de noirceur qui imprègne ce film tout entier.
Malgré la violence du récit, l'œuvre reste douce et poignante, tenaillés par différents sentiments pendant le visionnage comme l'angoisse, l'amour et la peine. C'est un film fort qui table sur plusieurs tableaux pour mieux nous mener en bateau et nous faire vivre une expérience visuelle inoubliable.
Le massacre final n'est pas une conséquence directe de la guerre. Il est plutôt une conséquence de l'aliénation d'un enfant privé d'enfance et élevé dans la douleur d'un pays sans avenir apparent.
C'est là toute la subtilité du réalisateur. Il ne montre jamais des soldats ni des scènes de guerre mais la suggère sans cesse notamment par le biais des lingots d'or.
En dépit de tous ces éléments historiques, L'Echine du diable met en scène des fantômes. Guillermo Del Toro ne se contente pas d'intégrer des fantômes dans son film. Il tente de réinventer la figure du fantôme, car en effet, le fantôme restera discret et ne sera qu'un prétexte pour sublimer la véritable intrigue de l'histoire.
Mais surtout le réalisateur pose ouvertement la question : qu'est ce qu'un fantôme ? D'après le film, un fantôme serait "un moment de douleur", quelque chose qui a été oublié.
L’ensemble du film frôlant la perfection au niveau de la réalisation, de la mise en scène et du scénario. L’Echine du diable est un doux cauchemar, dont le réveil laisse pensif, comme touché par « un sentiment suspendu dans le temps », ce « quelque chose de mort qui semble encore en vie
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