Le squelette dans le placard
Stephen, mon Stephen, mon King, mon roi de l'épouvante... Mais que s'est-il passé ? J'ai déjà lu plus d'une dizaine de tes romans, et aucun ne m'avait à ce point déçu que celui-là, qui est donc à mon sens largement surestimé. Je te le demande, quelle est ton excuse pour avoir sorti quelque chose d'aussi mauvais ? As-tu utilisé la même technique douteuse que ton héros, Michael Noonan, qui, lorsqu'il n'arrive plus à pondre la moindre ligne, envoie à son éditeur un manuscrit écrit vingt ans plus tôt en lui faisant croire qu'il s'agit bien de son dernier livre ? Evidemment, je ne l'espère pas. Et pourtant, "Sac d'Os" a tout du roman de seconde zone, le genre qu'on commence plein de bonnes intentions et qu'on termine dans la souffrance, le genre qui n'aurait pas dû quitter le tiroir dans lequel il dormait.
C'est simple, à un moment, je me suis demandé si tu ne t'étais pas inventé un autre double que Richard Bachman, car même ton style m'a paru méconnaissable ici. J'ai eu l'impression de lire un auteur débutant dans le domaine du fantastique, tant les ficelles sont grosses, tant c'est parfois niais et mal écrit, tant l'intrigue est bancale, tant le bouquin est bouffi de longueurs, tant la fin frise le ridicule et le larmoyant ... Oui oui, rien que ça ! Il m'est impossible de croire que "Sac d'Os" soit l'oeuvre du type qui a écrit "Ca" ou "Shining", ou alors ce type était en pleine dépression à ce moment-là. Il y a tout de même quelques moments forts qui permettent de ne pas lâcher le livre en cours de route, et tes thèmes habituels, Stephen (ou qui que tu sois), sont de nouveau bien représentés (le Maine, le lac, l'enfant comme sujet principal ou presque, l'écrivain à qui il arrive une tuile...). Ce sont d'ailleurs les seules choses qui permettront au lecteur d'être relié à toi, car laisse-moi te dire que, comme Sara Laugh hante le chalet de Noonan, tu ressembles ici au fantôme de ce que tu fus. Ce que j'aime habituellement chez toi, c'est que ton style est tellement limpide et accrocheur que j'ai la sensation d'être devant un écran de cinéma... Là, c'était si insipide que j'ai vu un téléfilm du dimanche après-midi sur M6.