Sang mêlé
7.5
Sang mêlé

livre de Jim Thompson (1973)

Nous y voilà. C'est avec un drôle de sentiment qu'on approche Sang Mêlé. Heureux de poser les yeux sur un roman de Jim Thompson (comme toujours) mais aussi triste en sachant qu'il s'agit de son dernier. Le plaisir finit évidemment par l'emporter, ce qui n'est guère surprenant eut égard au génie de l'auteur. Cette ultime exploration en terre corrompue permet à Thompson de s'offrir une sorte d'œuvre somme où il pourrait rameuter toutes ses obsessions. Le livre est à ce titre plus proche de la comédie noire type Pottsville 1280 Habitants, où chaque personnage va se révéler plus tordu qu'il n'en a l'air. Et on rigole pas mal devant les machinations, mensonges et passes d'armes (assez crues, il faut le dire) essaimant le livre à un rythme des plus soutenus. L'auteur régale une fois de plus avec son écriture épurée mais précise et jouit de sa position de narrateur omniscient pour nous plonger dans les esprits immoraux de ses personnages. Détestables c'est vrai et pourtant on prend un certain pied à mariner dans leurs psychés détraqués. Croyez-le, notre héros négatif du jour (Critch) n'est pas loin d'être le parent pauvre de la portée. Son frère Arlie est au moins aussi vicieux, tout comme la charmante meurtrière à la langue bien pendu Ethel. Et ne parlons pas des sœurs Squaw Kay et Joshie, dont les crêpages de chignon valent leur pesant d'or. On oublie pas les actions et scènes les plus obscures, contenues dans la première moitié. Cela étant dit, Sang-Mêlé ne poussera pas le bouchon aussi loin que L'assassin qui est en moi ou Rage Noire, si tant est qu'on puisse considérer qu'une poignée de morts et des manipulations en cascade sont de l'ordre du raisonnable. Que voulez-vous, c'est un peu notre monde. En tout cas, celui de Jim Thompson. Et le romancier surprend en y assumant quelques références autobiographiques plus directes (le shérif et son adjoint). On peut le voir comme une manière de boucler sa grande fresque noire de l'Amérique. J'aurais préféré que les derniers chapitres soient plus inspirés concernant Ethel, mais je n'ai pas boudé mon plaisir sur l'ensemble. Thompson achève l'œuvre monumentale par un bon dernier opus qui pourrait bien être la porte d'entrée idéale dans l'univers du maître pour les néophytes. Histoire d'y aller "en douceur".

ConFuCkamuS
7
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le 12 mars 2025

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