L’imprévisible Dantec (Satellite sisters)
De roman en roman, Dantec s’est forgé un style, de plus en plus radical, jusqu’à devenir complètement opaque pour le lecteur. En revenant à ses premiers romans, Dantec revient aussi vers ses lecteurs, mais sans revenir à la normalité. Si « Satellite sisters » est bien la suite directe de « Babylon babies », le style a muté. Fini la psychologie, fini les dialogues, fini la narration et fini les règles de grammaire : bienvenue dans le futur. « Satellite sisters » est une fuite en avant, d’une île du Pacifique jusqu’aux étoiles, dans la Terre de 2030 contrôlée par « l’ONU 2.0 ». On y retrouve le mercenaire Toorop, les jumelles Zorn, aux côtés d’une double plante et d’une tri-machine schizomatricielle communiquant télépathiquement par bio-photons. Décrit ainsi, ça a l’air dingue et ça l’est bel et bien, mais tout ça est très sérieux. Avec une narration jamais vue ailleurs, parfois incompréhensible mais qui ressemble plus que jamais à de la poésie, Dantec donne réellement l’impression aux lecteurs de se retrouver face à un roman venu du futur. Ce que certains appelleront des élucubrations ne sont pas dénué de fondement (en ce qui concerne le Las Vegas orbital par exemple). Il faut cependant prendre un peu plus de recul avec les propos défendus par l’auteur, toujours prêt à provoquer (notamment vis-à-vis de l’ONU), mais qui auront le mérite de bousculer le lecteur.
Une certitude : avec « Satellite sisters », son meilleur roman, Dantec clôt et dynamite ses premières œuvres, signant l’un des plus grands romans de science-fiction française écrit ses dernières années.