"Schismatrice +" regroupe un roman et plusieurs nouvelles autour du même univers.

La Terre est devenue un sanctuaire pollué et apparemment livrée à un régime rétrograde et autoritaire. Le reste de l'Humanité forme l'essaim, et est obligé d'évoluer pour survivre. Il y a les Mécas, avec des implants qui augmentent leurs capacités, et les morphos, qui contrôlent leur propre code génétique (intelligence et charisme augmentés, articulations improbables pour assassin, etc...). L'espérance de vie augmente pour ceux qui en ont les moyens. Plusieurs confédérations se font concurrence : les Anneaux près de Saturne (capitale Golreich-Tremaine, du moins un temps), le Zaibatsu circumlunaire, la ceinture d'astéroïdes, etc... Il y a les Apaches, ces gars qui squattent les stations ruinées. Et aussi une myriade de vaisseaux-Etats, comme le Red Consensus, un ancien croiseur soviétique. Moins qu'un roman cyberpunk on a là un vaste univers en évolution perpétuelle, car aux factions politiques s'ajoutent des factions intellectuelles (post-humanistes, galacticistes, etc...).

Avant d'en venir à mes notes-résumés sur ces bouquins, je dirais que je n'ai pas apprécié ce roman. Peut-être est-ce la traduction française. Peut-être est-ce le style d'origine. En tout cas l'écriture n'est pas attrayante, l'univers un peu rébarbatif, et il est difficile de s'attacher aux personnages, qui sont noyés dans un océan de descriptions ultracomplexes. Lecteur de Gibson, je suis capable d'encaisser pas mal, tant que je comprends l'esthétique derrière. Mais le monde de Sterling est par trop étranger, et la scène d'introduction -la mort de Vera Kelland - est un véritable parpaing que le lecteur se prend en pleine gueule. Je pensais beaucoup plus à "Dune" qu'à l'auteur de "La machine à différences", par moment. Bref, en dépit de nombreux moments de grâce, et d'une richesse qui frise l'indigestion, l'écriture m'a souvent rebuté, et je n'ai compris qu'après-coup que ce livre a finalement beaucoup d'humour. En première lecture, c'est cependant difficile à déceler, et ça c'est une faute. Pour résumer, c'est le syndrôme de l'univers-foisonnant-qui-noie-toute-action.

Le thème principal est l'évolution et le devenir de l'Humanité au contact d'autres races, de l'univers spatial hostile. L'homme peut-il devenir son propre Démiurge et choisir la forme qui lui convient le mieux ? Doit-il s'adapter au risque de perdre son identité ? La réponse est plutôt négative, on s'en doute, mais c'est rarement formulé.

"La schismatrice" est le corps de ce recueil. Un roman de 520 pages qui suit le parcours d'Abélard LIndsay, personnage qui ne cesse de changer de nom ou de forme physique au gré de son ambition. Aristocrate déchu de feu la République circumlunaire, Lindsay se fait Apache, relance la mode du théâtre avec l'aide d'un certain Rioumine, puis se fait passer pour mort après une tentative d'assassinat fomentée par son ancien camarade, l'ambitieux Philip Constantin. Echappé à bord du Red Consensus, une république-pirate, il manque de mourir sur l'astéroïde Esairs XII aux côtés de Nora Mavridès, une morpho. C'est alors qu'apparaissent les Investisseurs, race reptilienne à la technologie supérieure, qui ouvre un partenariat avec l'espèce humaine, comme elle l'a fait avec les 11 autres races existantes. Les Investisseurs recueillent Abélard et Nora.

Constantin, qui a pris le contrôle des Anneaux à la tête de l'Union des Skimmers, pourchasse Abélard, qui s'est réfugié dans le Cartel de Dembowska (où il retrouve Kitsoune, une ancienne morpho devenue une entité biologique énorme). Un duel virtuel entre Constantin et Lindsay tourne à l'avantage de ce dernier. Après être passé voir Pongpianskul, le fondateur d'une République néoténique qui veut former un conservatoire de l'Humanité originelle, Abélard tombe sur une bande qui lui permet de faire chanter une reine Investisseur. Il crée dès lors sa propre république, l'essaim de Czarina, indépendante des autres groupes humains, et du coup très recherchée. Il consacre sa vieillesse (de plus en plus d'implants sont nécessaires) à un projet de terraformation. La république finit par mourir quand Wellspring, le régisseur, fuit avec la reine pour terraformer Mars. Lindsay part sur Terre voler des échantillons génétiques des grands fonds pour coloniser les fonds d'Europe (grand, grand moment). Suivi par une Présence, qui lui propose de changer d'enveloppe pour le suivre à travers le système solaire, Lindsay accepte.

- "L'essaim" rapporte la mission d'un Morpho, Simo Afriel, qui part rejoindre le Dr Myrni, une surdouée qui étudie la race de l'Essaim, des insectes surpuissants. Les Morphos pensent pouvoir les cloner et les contrôler par phéromones, mais tout ne se déroule pas comme prévu. L'essaim, race très ancienne, perdure car elle refuse la conscience, l'évolution et l'innovation.

- "Rose l'Aragne" est une nouvelle à l'humour grinçant sur une marginale méca qui vit seule sur une station en forme d'araignée. Contre une gemme rare, elle obtient des Investisseurs une mascotte qui a la particularité, après une mue, de devenir exactement la présence dont a besoin son maître. Mais tout ne se passe pas comme prévu...

- "La reine des Cigales" raconte, à travers Hans Landau (qui est le narrateur), la fin de la République de Czarina et les débuts de la terraformation de Mars. On en apprend un peu plus sur les Homards, des humains qui rassemblent tous leurs organes dans une combinaison protectrice qui permet d'aller dans l'espace et d'avoir une perception augmentée. Je n'ai pas compris ce que devenait Wellspring.

- "Jardins engloutis" raconte un épisode de la Terraformation de Mars. L'essaim royal, pour encourager la terraformation, envoie des factions déchues dans des colonies pionnières. Un concours affronte plusieurs factions qui doivent terraformer chacune un bout de cratère dont la terraformation était incomplète. Sauf que ce cratère est occupé par des primitifs issus des débuts de la colonisation...

- "Vingt évocations" est un récit désopilant, en 20 anecdotes, de la carrière d'un parrain Méca.

Pour résumer, "Schismatrice +" est un recueil qu'il est difficile d'aimer en première lecture, du fait de son écriture rebutante. Une fois le canevas compris, on peut en comprendre les subtilités, si l'on a le courage de revenir en apesanteur.
zardoz6704
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le 15 mars 2013

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