Malsain, touchant, mais prétentieux et répétitif
Ce roman sur le destin tragique d'un homme qui accumule tous les malheurs de la Terre m'a d'abord enthousiasmé. Pendant plusieurs centaines de pages, j'ai été étonné en bien par cet auteur dont je ne connaissais rien, et je me suis longtemps demandé qui était ce serial killer qui découpait des fillettes en plusieurs morceaux et laissait leurs corps à l'abandon sur le bord des routes de Géorgie… La description de l'Amérique rurale des années 40 et 50 était en outre si convaincante qu'on s'y croyait presque.
Mais voilà, au bout d'un moment, j'ai commencé à trouver le temps long, et à saturer de ces meurtres à répétition, par ailleurs décrits avec une évidente complaisance (il y a notamment un passage où l'auteur dépeint en long et en large l'agression physique et sexuelle d'une fillette… en se mettant dans la tête de cette dernière). Comme s'il ne savait plus quoi raconter, Ellory passe une bonne partie du livre à nous rabâcher les oreilles avec les noms des victimes et des histoires d'anges gardiens, et le héros geignard qui passe son temps à pleurer pour un oui ou pour un non finit même par devenir antipathique. Que le narrateur principal ait des états d'âme, pourquoi pas, mais quand ça dure pendant des centaines de pages, je dis stop !
La résolution de l'enquête m'a également laissé sur ma faim : le héros découvre sur une simple intuition qui est le tueur, et Ellory ne prend pas le temps de nous expliquer ses motifs, alors qu'on n'attendait que ça pendant près de 600 pages ! 32 meurtres sordides qui ont hanté Joseph Vaughan pendant toute sa vie, et l'on n'a pas droit au moindre début d'explication… Bonjour la frustration !
L'écriture est quant à elle à double tranchant, ce qui n'a finalement rien d'étonnant quand on sait qu'il s'agit du premier livre de l'auteur : Ellory est très efficace quand il décrit simplement et laconiquement la vie de Joseph Vaughan, mais par moments, il se prend pour je ne sais qui et nous bassine avec un style particulièrement prétentieux et indigeste.
Au final, "Seul le Silence" mérite tout de même d'être lu, mais revoyez vos ambitions à la baisse avant d'attaquer sa lecture. Si le témoignage à la première personne de ce héros malchanceux aura de quoi émouvoir les âmes les plus sensibles, le style encore trop brouillon de l'auteur ne permet pas à cette d'histoire d'atteindre la plénitude de son potentiel.