Le Manchot, le Colonel et l'Indien
Et pour quelques dollars de plus est l'un de mes films favoris, et probablement l'un des plus grands chefs d'œuvre du duo Leone/Morricone.
Dès le départ l'ambiance est posée : Lee Van Cleef s'amuse avec son pistolet/fusil à longue portée, Clint Eastwood mâchouille son cigarillo en lâchant quelques phrases par-ci par-là, et Sergio Leone multiplie les gros plans sans toutefois abuser du zoom comme dans ses films ultérieurs. Chose étonnante pour l'époque, le ton du film est assez léger, presque comique par moments : je pense ainsi au duel de chapeaux volants, à la descente du toit, ou encore à la présence de nombreux bruitages cocasses signés Ennio Morricone. Que les détracteurs de Terrence Hill et Bud Spencer se rassurent : ce western reste un film sérieux et bien loin des mauvais pastiches spaghetti, mais on ne peut qu'être en totale admiration devant ce jeune Clint Eastwood interprétant un chasseur de primes cynique et vénal.
Si la première heure sert avant tout à poser l'intrigue et à présenter les 3 personnages principaux, c'est lors de sa seconde moitié que ce western devient pour moi légendaire. Dans un village blanc presque abandonné, le contraste avec le ciel bleu est alors saisissant. Eastwood ne décroche presque plus un mot et finit même par s'effacer pour laisser la vedette à Lee Van Cleef : ce dernier, imperturbable dans son rôle de colonel revanchard, est le héros du mythique duel final rythmé par la montre à gousset. Ennio Morricone est alors au sommet de son art, et il nous prouve par la même occasion à quel point la musique était essentielle dans le montage des westerns de Sergio Leone.
Le cinéaste italien frôle donc la perfection avec ce deuxième épisode de la trilogie de l'Homme sans nom. Pour une fois, le héros campé par Eastwood n'est d'ailleurs pas si solitaire que cela, et son alchimie avec Lee Van Cleef fait vraiment plaisir à voir. Notez enfin que la version française est d'excellente facture : outre les grosses voix graves caractéristiques de l'époque, c'est surtout celle de Jacques Deschamps qui donne à Clint Eastwood un ton bien plus désinvolte que dans la version originale.