Sans l'habit.

Soudain l'été dernier est une courte pièce en quatre tableaux publiée en 1958 par Tennessee Williams. Dans une ambiance irréelle de jardin envahi par la végétation préhistorique, la vieille matriarche, Mme Venable, ne parvient pas à se consoler de la mort de son fils chéri, Sébastien, et veut une fois pour toute la tête de sa nièce, Catherine, qui accompagnait son cousin l'été de son décès. Mais celle-ci, en proie à une dépression hallucinée, s'en tient à une version incroyable de l'histoire qui ne sera révélée que dans les toutes dernières répliques de la pièce.

On retrouve l'ambiance sirupeuse et effrayante du Tennessee Williams des nouvelles, qui met en scène dans une atmosphère de folie les désirs déréglés de ses contemporains dont le caractère foncièrement sordide se transforme toujours à la fin en carnaval fantastique et horrifiant.

La pièce est intéressante pour son excellente hypotypose finale, érinyenne et fascinante, pour sa didascalie liminaire fascinante et luxuriante. Le dispositif soutient assez bien un portrait très négatif en creux de la façon dont l'appétit, dans le monde bourgeois, régule sans contrôle ce qui est tolérable ou non comme sévices ou comme exploitation de l'autre et de son corporalité.

Mais entre ces deux pôles, c'est un peu calme à mon goût. Je retrouve le Tennessee Williams du "Boxeur manchot" et du "Masseur noir" mais précisément, s'il est capable d'être aussi intense en récit en vingt ou trente pages, pourquoi délayer le même effet en dialogues sur cinq à six fois plus long alors même que la forme dramaturgique ne semble rien apporter de très consistant de plus.

La rencontre avec une idée plus qu'avec une forme, en somme.