Dans ce court roman de SF, Adrian Tchaïkovsky est parvenu à faire un trait d'union entre 2 romans que j'ai lu récemment et que j'avais apprécié : l'espace d'un an de Becky Chambers (https://www.senscritique.com/livre/l_espace_d_un_an/critique/297299908) et Piranese de Susanna Clarke (https://www.senscritique.com/livre/piranese/critique/270955511). (lien vers mes critiques de ces 2 très bon bouquins)
En effet, on va suivre les pérégrinations de l'astronaute Gary Rendell au sein d'un artefact qui défie les lois de la physique aux confins de notre système solaire : le Dieu-Grenouille. Gary fait partie d'une expédition d'humain envoyé pour explorer cet objet spatiale, dont la forme évoque un batracien. Mais suite à un incident, il se retrouve à errer seul, coupé de son équipage. Les chapitres vont donc alterner entre les souvenirs de Gary sur le montage de l’expédition ; et son errance dans ce drôle de labyrinthe se jouant des lois de la physique.
Il rôde donc dans ces couloirs sombres, ces grandes pièces menaçante, où la gravité peut s’inverser d'un seul coup, où l’atmosphère devient irrespirable. C'est assez bien retranscrit, bien que moins puissant que dans Piranèse. Mais le lieu devient quand même quasiment un personnage avec ces mystères et son lot de questions et de pistes (l'auteur se gardera bien d'apporter des réponses!)
Au gré des déambulations, Gary va tomber sur d'autres formes de vies, qui semblent aussi en cours d'exploration de ce lieu. Certaines bienveillantes, d'autres franchement moins. Comme chez Becky Chambers, il y a un réel effort de nous faire découvrir ces nouvelles espèces. J'ai apprécié le fait de ne pas tomber uniquement sur des humanoïdes, mais de nous amener à réfléchir à d'autres formes de vie (moins carbonée, avec d'autres formes de motricité ou de langage ou de formes). LA xénobiologie est à l'honneur. On découvre donc des créatures monstrueuses, avant de petit à petit comprendre que l'humain l'est tout autant pour elles et eux que nous pour ces derniers.
La monstruosité de l'être humain va alors transpirer, autant de la violence dont fait preuve Gary pour survivre dans ce labyrinthe, que par l'absurdité des luttes politiques ayant éclot lors du montage de l'expédition.
Mais on reste sur un ton badin, très humour british où l'horreur est raconté avec un détachement et une ironie qui permet de ne pas sombrer dans un roman d'horreur bien que le sujet s'y prête.
Au final, je pourrai reprocher à ce court roman d'avoir justement été trop court, de survoler certains thèmes que j'aurais aimé voir plus développer. Mais le tout est rattrapé par les superbes descriptions du lieu ou des autres formes de vie. J'ai hâte de découvrir la prochaine destination après ce Dieu-Grenouille !