Where is my lol ?
Je me suis faite totalement avoir: une jolie couverture aux couleurs pop, un résumé qui m'annonce l'histoire d'un looser dont le but dans la vie est de récupérer un comic rare, j'ai sauté dedans à...
le 21 janv. 2011
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Harvey, le personnage principal vit à Londres en tenant un magasin de BD, sa passion depuis toujours. Son malheur, c’est l’échange qu’il a proposé, gamin, à un camarade. L’autre, c’était Charles Odd, surnommé Bleeder (l’hémophile, le pauvre gars), en français Le Bizarre. Bleeder était le souffre-douleur de sa classe d’âge, tout simplement parce qu’il avait le malheur de ne pas se fondre dans la masse et de ne pas avoir un physique de rugbyman. Tous ceux qui voulaient marquer leur supériorité s’en prenaient à lui. Un jour, Harvey était tombé sur Bleeder alors que celui-ci trainait seul dans son coin. Pour faire le sympa, Harvey lui avait proposé une BD qui ne l’intéressait pas vraiment. Détenir cette BD pouvait apporter un peu de prestige à Bleeder. Harvey avait joué là-dessus pour sa proposition. En contrepartie, il avait accepté le premier objet proposé par Bleeder, un morceau de plastique avec lequel celui-ci fauchait la végétation sur son passage, un bon engin de destruction selon ses observations. Le troc avait été réalisé, les gamins avaient grandi, Harvey devenu un ronchon (gros soupir) fuyant ses parents pour une vie sans relief, sous l’œil goguenard de Josh son employé chez « Inaction comix ». La spécialité d’Harvey est donc le comic américain et ses super-héros qui sauvent le monde dans leur costume avec cape. Le malheur d’Harvey, c’est que la BD qu’il a cédée à Bleeder est le Superman numéro 1, désormais un objet de collection (et de valeur). Cette BD, c’était sa BD, Harvey en a fait une obsession dont il rebat les oreilles des uns et des autres depuis des lustres.
A force de se plaindre de sa mauvaise fortune, en particulier devant Josh, Harvey se décide à assister à la réunion annuelle des anciens élèves de son école, en espérant y retrouver Bleeder. Il en est au point de fantasmer cette rencontre, car bien entendu, pourquoi Bleeder viendrait retrouver ses anciens bourreaux ?
Harvey retourne dans le village des Cornouailles où vivent encore ses parents. Comme par hasard, il tombe sur Bleeder qui séjourne provisoirement chez sa mère. Plutôt maladroit, Harvey aiguille la conversation mais n’obtient aucune indication intéressante. En désespoir de cause, il décide de s’improviser cambrioleur. Malgré la réputation de Mrs. Odd, une femme acariâtre et agressive à l’occasion, il s’introduit par effraction dans sa maison, explore et arrive jusqu’à la cave. Incroyable, il tombe sur le Superman numéro 1 en parfait état, encore sous plastique. Malheureusement, une autre surprise l’attend au même endroit. Une surprise très désagréable qui l’incite à prendre ses jambes à son cou. Quand le courage lui revient et qu’il décide de faire demi-tour, c’est pour retrouver la désagréable surprise, mais le Superman numéro 1 s’est envolé…
A partir de cette situation de base, l’auteur trousse une enquête truffée de références, que ce soit à Edgar Poe (La lettre volée) la BD ou la musique notamment. Mon titre lui, fait référence à la littérature classique Ce que savait Maisie de Henry James. Ici Maisie ignore certains faits du passé qui ont fortement contribué à la psychologie de son mari. Des événements qui auront leur importance dans le dénouement de l’intrigue. On remarque également que l’auteur maintient le suspense jusqu’à la fin et que son humour fait passer quelques bons moments au lecteur. On peut lui reprocher d’utiliser une intrigue qui fonctionne sur des ressorts pas franchement originaux et quelques hasards qui s’enchainent parfaitement. Mais sa description du milieu des amateurs de BD (adolescents attardés) sonne juste. De même pour la population du petit village des Cornouailles ainsi que pour les relations entre anciens élèves.
L’intrigue est bien ficelée et vaut jusqu’à l’ultime révélation. L’aspect psychologique est probablement le plus intéressant dans ce roman, le premier d’Anthony Moore (pseudo d’un psy anglais). Un roman ayant comme enjeu une BD, voilà qui change un peu de l’ordinaire. Le conseil de l’éditeur est justifié « Ne commencez ce roman que si vous avez du temps, car vous ne pourrez pas le lâcher ». En ce qui me concerne, je l’ai lu quasiment d’une traite. Il est vrai que de nombreux dialogues facilitent la lecture.
Un vrai reproche sur les choix éditoriaux : la traduction est hésitante sur un point délicat, le surnom de Charles Odd. Et puis, le titre est présenté comme une interjection typique de la BD, alors que c’est juste un raccourci du titre original The Swap qui signifie l’échange, le troc.
Quelques extraits, en option :
Chapitre 23 « Ne laissez jamais votre famille se mêler de vos affaires, telle était la règle simple de l’existence. »
Chapitre 24 « Comment se faisait-il que les parents réussissaient toujours à vous exaspérer, même quand vous étiez à des kilomètres, même sans le savoir, inconsciemment, sans préméditation ? En temps normal, quand il les appelait, il priait pour que ce soit occupé, et ça ne l’était jamais. Il y avait toujours une longue succession de sonneries, si longue qu’il commençait à se dire qu’ils étaient sortis, ou bien morts, mais au moment où il allait raccrocher, avec un grand sourire de soulagement, sa mère décrochait et de sa petite voix, celle qu’il ne reconnaissait pas, celle qu’elle réservait aux autres, elle disait « Allo ? » comme si elle n’avait encore jamais parlé au téléphone et risquait d’être punie. Alors, il grommelait : « Salut, maman », et aussitôt elle devenait très différente de cette petite personne. « Harvey chéri ! » s’exclamait-elle et c’était parti pour le premier jeu : elle essayait d’en savoir plus sur sa vie et lui essayait de l’en empêcher. Cela débouchait rapidement sur le deuxième jeu : elle essayait d’entretenir la conversation malgré l’absence d’informations sur lesquelles s’appuyer, et lui essayait d’y mettre fin sans se montrer trop malpoli. »
Chapitre 27 « Il y a dans la vie certaines expériences qui semblent nous hanter et nous rendre malheureux. Certaines parce qu’elles sont si terribles qu’on ne peut jamais les oublier totalement, d’autres pour une raison plus douce-amère : elles sont si parfaites qu’on ne peut plus jamais vivre pleinement une expérience similaire sans établir de comparaison. En se réveillant le lundi matin, Harvey savait que la nuit précédente serait une chose qu’il chercherait inlassablement à reproduire, toute sa vie, en ayant fort peu de chances d’y parvenir. »
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Créée
le 11 mars 2014
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