Dans les années 80 au Guatemala un enfant de 13 ans et son frère participent sur ordre de leurs parents à un camp de survie pour enfants juifs. « Parce que les enfants doivent connaître la douleur de leurs parents. Parce que les petits-enfants doivent connaître la douleur de leurs grands-parents. » Et la vie dans ce camp vire très vite au cauchemar pour ces enfants qui vont de peurs en humiliations. Épisodes traumatiques (mais qui ont aussi construit l’identité de l’auteur) que celui-ci revit et reconstruit des années plus tard à l’occasion notamment de deux rencontres à Paris et à Berlin.
Le récit (autofiction ?) est composé d’une suite de paragraphes (200 pages) qui mélangent passé et présent, réalité et invention (ainsi on ne saura jamais si la tarentule couvrant l’avant-bras du chef de camp était réelle ou imaginaire – svastika ? - ) ; la mémoire de l’auteur a-t-elle été altérée par le temps, créatrice de faux souvenirs ou alors étaient-ce des évènements circonstanciées incontestables ?
On passe d’un lieu à un autre plus singulier, d’un souvenir familial à une rencontre plus étrangère. Et tout finit par se recouper et la trame du début s’éclaire, mais pas complètement.
A noter de beaux passages écrits comme, par exemple, celui-ci : « (…) ce qui me ramenait à la vie, ce n’étaient pas les caresses de sa main rugueuse qui sentait le maïs et le charbon de bois, ni la fumée d’eucalyptus sur mon corps, ni l’onguent noir à base de cendres et de sève, ni même les tortillas salées ou l’eau fraîche aromatisée à la cannelle, mais ces étranges mots susurrés, ces mots immémoriaux, ces mots qui à l’intérieur de ce qui était à peine une maison, se mêlaient jusqu’à se confondre au chant de milliers de grillons dans la nuit. » Une splendide évocation.