Si l'on m'avait dit un jour que je passerai un meilleur moment de littérature avec ce sombre petit polar capiteux de série B qu'avec un grand classique de la littérature, académique ou simplement établie, j'aurais sans doute hausser les épaules d'un air détaché, voire méprisant, toisant mon interlocuteur comme on considère une déjection canine sur la chaussée. Je me serais sans doute ensuite esclaffé en y repensant, avec, dans ma main gauche, Crime et Châtiments, et ma main droite un gobelet de chez Starbucks, me baladant dans les rues de la capitale belge avec le petit ami que je n'ai plus. Mais, aujourd'hui, traînant lamentablement entre mes draps propres sentant la vanille de l'adoucissant, mon esprit nimbé par les vapeurs des anxiolytiques pris dans la journée, triste, seul, malheureux, je ne ris plus du tout et l'affirme haut et fort : The Blonde est une véritable tuerie. Tuerie au sens littéral, évidemment, tant le roman se complaît dans l'explosion d'hémoglobine, de détails gores et monstrueux, et tuerie au sens littéraire, car le roman ne se contente pas d'être ce que l'on attend de ce genre de livre, à savoir une parodique intrigue policière sombre et un peu crasseuse, mais bien une explosion de péripéties drôles, cyniques et profondément absurdes, voire futuristo-mystiques. Ici, la série B s'infiltre dans la littérature et nous invite dans la lecture frénétique, précise et magnifique d'une nuit folle, comique et merveilleusement ubuesque, qui commence quand une belle blonde s'assied à côté de vous et vous annonce qu'elle a empoisonné votre verre : tout un programme.