Un tigre moins innocent qu'une blanche colombe
Roman drôle et immoral, "Le tigre blanc", c'est d'abord le surnom du héros enfant, remarqué par un inspecteur d'école qui compare son intelligence à la rareté de cet animal dans la jungle. Celle-ci mènera Balram Halwai, simple chauffeur, provenant d'une caste inférieure de la société dans une province pauvre de l'Inde vers la réussite financière et sociale à Bangalore. Cette ascension singulière passera par des sacrifices, des humiliations et un assassinat, racontés avec la légèreté et l'ironie d'un humour typiquement britannique. Le contraste entre le récit du protagoniste, apparemment dénué de sentiments et de culpabilité, et la situation dramatique du quotidien des indiens vivant dans la misère, crée une atmosphère de cynisme à la fois étonnamment attachante et terrifiante. On ne sait comment juger le héros qui a choisi la voie de l'individualisme dans un pays où s'occuper de sa famille est un devoir et où l'on ne choisit ni son mariage, ni sa profession.
Au delà de l'histoire, ce roman est aussi un portrait fidèle de la société indienne contemporaine, sorte de cour des miracles géante et bruyante qui vit et avance à cent à l'heure.
Comment conquérir sa liberté personnelle en se débarrassant de l'emprise de sa famille et en dépassant l'immobilisme du système des castes ? La réponse est dans la longue lettre que Balram adresse à Wen Jiabao, et que je vous recommande chaudement (et en plus en anglais, c'est plutôt facile à lire).