La surinterpretation à son paroxisme

J'avoue avoir du mal avec les essais d'auteurs qui font des parallèles sur des œuvres dont les réalisateurs eux-mêmes n'ont jamais fait la mention. Si par exemple Lynch n'a jamais parler de franc maçonnerie pour la black lodge dans une interview en 25 ans, et même si la black lodge renferme des symboles maçonniques (le sol noir et blanc, le rouge, la chevalière, le langage codée, etc), bon bah c'est quand même pas de la franc-maçonnerie. Et il faut l'accepter. Car à force de tout sur-analyser, on risque de faire dire à quelqu'un ce qu'il n'a jamais voulu dire.

Il y a trop de petites choses dans Twin Peaks qui fait qu'on ne peux pas analyser la série en prenant une phrase qui nous arrange par ci avec une séquence qui nous arrange par là pour évoquer "ce qu'il a vraiment voulu dire" à la série, et puis bien évidemment, changer de théorie au second chapitre...

A un moment, il faut aussi accepter que Lynch a sans doutes puiser dans d’innombrables sources artistiques et historiques uniquement pour évoquer des émotions au spectateur sans pour autant y sous-entendre des secrets à la limite du complotisme comme le fait malheureusement Pacome Thiellement dans le livre.

Il affirme par exemple que la série se concentre sur les problématiques des années 50 mais je la trouve souvent en avant-garde : on a une personne transgenre (Denise), Catherine est une femme de pouvoir, Norma a un sous-texte presque féministe, Andy et son rapport à la virilité face à Richard ou les allusions au bouddhisme qui n'ont rien à voir avec les années 50. C'est pas parce que la mise en scene s'inspire du film noir qu'il faudrait y voir tous les secrets les plus farfelus.

On peux également voir dans le livre des allusions à la spiritualité que Lynch aurait pris à la tradition arabe et au coran, mais c'est surtout le bouddhisme qui est omniprésent dans la série, et c'est le bouddhisme qui ressemble à la pensée soufi (donc musulmane, donc coranique) mais en aucun cas ça n'en fait pas une allusion directe pour autant... Il y a pleins de petits raccourcis désagréables comme ça.

De même que prétendre que le doppelganger fait allusion aux tueurs en série de part son look alors que Donna, Bobby et tous les jeunes adultes sont aussi habillés à la mode des années 80/90 et quand on a vu Fire Walk With Me, il est clair que le doppelganger incarne des choses bien plus complexes que le simple cliché du tueur en série. Enfin bon, tout ça pour dire qu'il prend un peu que ce qu'il l'arrange.

Pour conclure, c'est un peu méchant mais ce livre me rappelle le jour où Christophe Gans en conférence avais fait une analyse ésotérico-philosophique devant Ridley Scott sur ces 3 premiers films et que Ridley Scott aurait répondu "Oui, mais moi je dirait plutôt qu'il y a mon premier film, puis mon deuxième film, et puis mon troisième film". Aïe. Lynch aurait probablement eu la même réaction.