Deux ans et demi après « Au revoir, là-haut », Pierre Lemaitre nous revient avec un thriller psychologique. Différents de ses premiers romans, « Trois jours et une vie » met en scène un jeune garçon, Antoine, sa mère et l’ensemble de sa commune où tout le monde se côtoie, se connait et se critique. On pourrait presque se croire dans un récit d’Armel Job ou de Simenon.
Elevé par une mère divorcée qui galère pour nouer les deux bouts, Antoine, douze ans, est un jeune à fleur de peau, sensible à l’injustice et à la médiocrité de sa vie. Sa vie, elle va basculer un beau jour de décembre, suite à la mort du chien du voisin, son ami, son confident. Ce fait divers tellement insupportable va le mettre dans une colère dont il ne se serait pas cru capable. Plus rien ne sera plus jamais comme avant.
Pierre Lemaitre parvient, à partir d’une banale histoire, à tenir l’intérêt du lecteur par une succession de situations qui sèment le trouble et conduisent à un mensonge dont il devient de plus en plus difficile de s’extraire. Il nous invite dans l’univers de Beauval, une commune rurale comme tant d’autres, avec son maire, son usine en difficulté qui fait vivre toute la région, ses querelles de voisinage, ses inimitiés et ses petites bassesses mais aussi une solidarité spontanée qui nait dès que le drame survient. Cet univers clos permet à l’auteur de décrire l’atmosphère de manière très aboutie et de nous plonger dans la psychologie de ses personnages qu’ils soient adultes ou enfants. Cette ambiance particulière va perdurer à travers les trois époques décrites jusqu’au dénouement final. Ce sont les points forts du livre.
D’une écriture simple et limpide et dans son style personnel, Pierre Lemaitre nous offre un récit addictif qui se dévore d’une traite malgré le sentiment de malaise que l’on éprouve d’un bout à l’autre. On suit presque minute par minute, le jeune Antoine, ses angoisses et ses cauchemars. Sans description glauque, sans hémoglobine, ce roman parle de la vie, la vraie vie, qui peut virer au drame en quelques secondes.
J’ai apprécié cette lecture même si elle n’a pas la force de « Robe de marié » ou de « Cadres noirs ». Le sujet est simple mais son traitement est maîtrisé. On retrouve le phrasé de l’auteur, son talent de conteur et c’est un vrai plaisir.