Décidément, ce roman, je n'y arrive pas !
Ulysse et moi, c'est une histoire d'incompréhension. Je suis parti sur de mauvaises bases et avec de mauvaises intentions. On m'avait dit qu'Ulysse était "le roman le plus compliqué". Je m'étais donc plongé tête baissée, heureux de me lancer dans un tel défi et prêt à fourbir tous mes neurones à l'assaut de cette citadelle.
Résultat, je me suis cassé les dents.
Plusieurs fois.
Maintenant je sais pourquoi.
Je crois que je cherchais trop loin ce qui était proche.
Une quatrième (et ultime ?) tentative me l'a fait comprendre.
Cette fois-ci, j'ai essayé la nouvelle traduction, parue il y a quelques années. Excellente traduction au demeurant.
Et là, tout fut lumineux.
Si je n'y arrive pas avec ce roman, ce n'est pas parce que je ne le comprends pas.
C'est par une sorte d'incompatibilité avec l'écrivain.
Ulysse est un roman conçu pour être étrange, pour s'éloigner le plus possible du cadre normal du roman. Joyce multiplie les effets pour créer son livre :
_ mélange des genres : de la narration romanesque, certes, mais aussi du théâtre, de la chanson populaire, etc.
_ mélange des niveau de langue : à quelques lignes d'intervalle, parfois dans une même ligne, Joyce fait se côtoyer langage soutenu et gros mots
_ saturation en références historiques ou littéraires, Homère bien sûr, mais aussi Shakespeare et l'Irlande, qui tient une place très importante
_ saturation aussi en figures de style, spécialement des métaphores, parfois étrangement déroutantes (et en cela proches du surréalisme) parfois ridiculement stéréotypées (et alors, on peut les lire comme des critiques d'une sorte de sous-littérature). Ces figures de style, parfois particulièrement décalées, rendent le texte parfois inutilement complexe.
_ changements constants et abrupts de points de vue et même de narrateurs (un "je" apparaît de temps à autres, on ne sait pas vraiment qui il désigne et, à vrai dire, on s'en fout un peu).
Tout cela est d'abord particulièrement artificiel. peut-être est-ce là le but, d'ailleurs : dénoncer l'artificialité du genre romanesque, démonter la machine du roman. Entreprise louable, certes, mais mille pages de ce tonneau, ça devient lourd.
Car c'est là le défaut majeur du roman selon moi : sa lourdeur. Joyce ne se contente pas d'utiliser des procédés pour se moquer de ses petits camarades romanciers, il assène tout cela à coups de marteaux et recommence encore et encore. Au point que ça en devient vite indigeste.