Un appartement à Paris, de Guillaume Musso


Déjà le titre ‘Un appartement à Paris’ et la couverture qui se veulent vendeurs. « L’art est un mensonge qui dit la vérité ». L’auteur le dit lui-même. Or, dans le livre il n’est question du dit appartement que de manière détournée et les personnages n’y sont présents qu’à un seul chapitre. Donc le choix du titre me laisse perplexe. Peut-être aurait-il fallu davantage l’axer sur Sean Lorenz, l’artiste mort (et évidemment très talentueux, avec une histoire au combien mystérieuse) que personne n’a réussi à élucider avant ces deux énergumènes qui lèvent le voile du mystère en à peine trois jours. Le lecteur s'ennuie à suivre la description de la vie de cet homme mort qu'on ne rencontre pas, au lieu de voir se développer une histoire se déroulant de nos jours. Pourquoi ? Parce que les personnages principaux sont des objets, et les objets n'ont pas d'histoire à raconter. Il est à noter que les deux protagonistes, aux noms fort recherchés dans ce que je pense être un souci de crédibilité, à savoir : Gaspard … Coutances . COUTANCES. Et la femme … dont le nom ne me reste pas (après 400 pages, c’est dire si elle résonne en moi tant sa personnalité sonne creux) qui ne se connaissaient ni d’Eve, ni d’Adam, bien sûr se haïssent de prime abord mais deviennent proches, voire amoureux parce que les Happy end se vendent tellement bien n’est-ce pas ? Pour le coup, j’aurais aimé qu’un drame les termine.
Je feuillète, je feuillète. Mais suis-je bête, la quatrième de couverture a évidemment pris soin de citer les noms des deux (toujours) personnages (Madeline Green) si différents mais si proches dont le destin va … attention : « changer à jamais ». Et il en va des critiques élogieuses sur cette imagination incroyable, ou, ma préférée, ce simple : ‘addictif’. Rien à ajouter. Car il n’y a rien à ajouter. On a déjà dit la même chose sur ces 14 précédents romans, on ne va pas se répéter, enfin ! Et puis plus que trois mots et c’est trop long pour que les gens la lise jusqu’au bout, non, il faut du rapide, de l’extrême, pour que ça se vende. Après, que ça se lise, ce n’est plus leur problème.

Construire une pseudo personnalité aux héros de l'histoire ne sert à rien si elle n'est qu'un voile servant à dissimuler le vide. Gaspard : un misanthrope allergique à la technologie, mais qui, pour le besoin de l'histoire, va s'acheter un téléphone, éplucher internet et rencontrer une foule de personnes pour résoudre une affaire qui ne tient qu'à l'auteur. Madeline, dépressive et avec une grossesse médicalement assistée en cours, ne va, d'un coup, plus y accorder d'importance face à l'ENORME affaire sur laquelle elle tombe. Sa vie est moins importante que celle de ce peintre, un faire-valoir à celle-ci, alors on l'occulte.

Un flot de personnages inutiles aux action improbables, si ce n’est boire du café à en devenir malade. Dans un café au coin d’une rue. Il y a beaucoup de coins dans ces villes. Difficile de ne pas tourner en rond. Oui, leur esprit est troublé. Troublé par un passé difficile comme tous les grands personnages en vivent. Elle avec un chagrin d'amour, lui écrivain à succès. Qui est au-dessus de tout ça. Qui a de quoi se payer des appartements de 300 mètres carré à Montmartre mais qui n’a plus touché à un téléphone ou regardé la télévision depuis 25 ans. Evidemment, comme tout écrivain qui se respecte. Mais qui prend la liberté d’aller à droite à gauche entre New York et l’Espagne, parce que, 1. Soit Musso n’a pas l’imagination qu’on lui prête pour développer une histoire à partir d’un appartement, soit 2. Son personnage est libre de détester Paris, cette ville surcotée, qu’il connait par cœur, évidemment. Donc il voyage. Mais parcourir quarante fois la circonférence terrestre ne rendra pas le personnage plus interessant en soi. Il ne fait que bouger, en découvrant vite fait des secrets taris, tellement gros qu'on n'y croit plus. Mais toutefois pas assez pour qu'on estime le personnage. Et bien entendu la pièce de théâtre, son alibi de départ, s’écrira toute seule comme par magie avec l’aventure qu’il vivra.
Quoiqu’il en soit, ce livre fait couler beaucoup d’encre, à l’image de la pluie qui tombe sans discontinuité sur Paris ET l’Espagne, ET New York. Et bien oui, le tragique et le dramatique d’une intrigue n’est que plus vrai sous la pluie ! Mmmmhh… A mon avis, ne serait-ce pas plutôt pour noyer le manque d’idées, ou alors l’allégorie du désespoir que ressent le lecteur, forcé de continuer sa lecture pour pondre une critique ?
A cela s’ajoute des personnages trop caricaturaux : Pénélope la botoxée au passé déluré, muse de l’artiste et Pauline, l’étudiante fluette, fine, bien coiffée, qui invite un homme inconnu, qui vient de lui hurler dessus, à boire le thé chez elle, comme n’importe qui le ferrait dans les mêmes circonstances bien-entendu. Mais (oh ! quelle originalité !) qui écoute du hard métal pour cacher son côté caricatural. (Hum hum … raté !) Exception faite d’un commissaire de police à l’allure de limace et au visage de crapaud, qui se distingue donc par son physique uniquement, mais que j’ai eu du mal à me représenter pouvant exister.
On change sans cesse de point de vue entre Gaspard et la femme qu’on est obligé de relire le sous chapitre du chapitre principal pour se re-présenter la vraie scène.
Le peintre a évidemment un lien très important avec la nana principale, alors qu’elle n’en a jamais entendu parler jusqu’ici je le répète.
Enfin, des citations et des noms de chapitres sans doute tirés du site citations.net que l’auteur a jugé utiles pour faire de l’effet et donner l’illusion que ce qu’il raconte est plus que ce que c’est : une histoire fade que je ne relirai pas.
Il ne se passe rien à part des allers-venus, des personnages faux qui acceptent de livrer des indices, sans sentiments, tels des objets. Un dénouement tiré par les cheveux : en ne citant au hasard que la mosaïque en forme de zèbre, renvoyant à un QR code que personne n’avait remarqué avant, pas même le patron dudit restaurant.
Et en passant sur certains retournements de situations grotesques, passons aux aspects que j’ai appréciés. Comme le vendeur de pigments de couleurs. Là, Monsieur Musso a décrit un personnage plus intéressant que tous les autres réunis. Malheureusement il ne tient pas plus de cinq pages, si ce n’est dix. Autre aspect : la scène glaçante du pouce arraché au gamin, coupé par sa propre mère sous la menace, ligotée dans des fils barbelés, nue, à se faire dessus et en sang, qui n’est pas sans me rappeler Saw, j’ai pour la première fois dans tout le livre été saisie - n'importe qui le serrait, après deux cent pages à s'embourber dans des eaux trop calmes - (en omettant ce sentiment de bizarrerie à voir quelques termes vulgaires par-ci par-là, sortis d’on ne sait où mais comme le font tous les grands écrivains américains qui se respectent).
Les pages se tournent rapidement ; heureusement, je vous dirais, car le format n’est pas insurmontable en soit : 500 pages (pour la version poche) lues en 48 heures. Ca passe le temps. Pour ces moments où le temps ne passe pas, il y aura toujours des livres qui l’arrêteront complétement.
Des tournures de phrases et des descriptions sympathiques sont à relever. Que je ne relèverais pas, ÇA, ça passe le temps, mais je me contenterai d’un pourcentage (pardon pourmillage, autant pour moi) : 10 lignes sur 510 pages (sachant que je compte 27 lignes par pages, ça ramène le total à 13 770 lignes). Au final, en essorant le torchon de ce long marathon, j’arrive à me désaltérer d’un petit 0,73 ‰ du cru venté par la couleur et l’impression très française de la couverture, méthode utilisée par beaucoup, sensées tromper le consommateur ? Et bien je suis contre !
Pour apporter à ma lecture un pansement métaphorique et la ranger, pince-sans-rire, dans le tiroir de ma mémoire, je dirai que c’est comme de s’être essuyé le derrière avec du PQ de marque, fort de son nom, vers lequel se tournent les consommateurs (on achète, on ne lit pas un produit), en désespoir de cause devant l’amas de choix possibles. Sur l’étagère, c’est ce PQ qui est mis en avant, parce que c’est le plus cher, mais aussi celui qui paradoxalement se vend le plus, qui rapportent le plus. Une fois l’acte accompli donc, aucune trace n’est laissée dessus. Zut, à quoi bon s’essuyer ? Utilisé, Il faut maintenant jeter le rectangle plié de tissu dans les toilettes. Avec une impression de s’être fait berner : l’emballage disait : double épaisseur, confort absolu, et gnagnagna. Pourtant c’est au moins dix feuilles qui sont parties inutilement dans les chiottes. On se dépêche de tirer la chasse parce que ça pue. Un appartement à Paris ? Vas-y t’inquiète, j’ai craqué une allumette. Sa lecture n’attend plus que toi. Ça fait ch(i)er ce genre de PQ. Heureusement que l’éditeur utilise « du papier géré de manière écoresponsable ». Riche en fibre. Ça doit être ça.
P.S : C’est le premier roman de Musso que je lis. Je retenterai Lévy. Il ne peut que grandir dans mon estime maintenant.
P.P.S : Pour moi aussi jouer au jeu du ‘exploitons des citations écrites par d’autres’, Matilda et Madame Floyot disaient : « J’ai beaucoup aimé son livre. Avec sa manière de raconter les choses, j’ai l’impression d’être là, sur place et, de les voir arriver. – Un bon écrivain te ferra toujours cet effet. Et ne t’inquiète donc pas de ce qui t’échappe. Lis tranquillement et laisse les mots te bercer comme une musique. »
Indubitablement, je ne peux que vous donner raison Monsieur Dahl. Et d’ajouter : Si un livre t’échappe des mains, c’est soit que la musique n’est plus une berceuse mais un puissant somnifère, soit que de lassitude, tu t’es rendu compte que le disque était rayé. (Pour les entêtés mais pas trop, le livre existe EVIDEMMENT en version audio, au prix mélodieux de 10 lots de 6 rouleaux de PQ Monoprix (ça fait donc 60, on est d’accord). Mais triple épaisseur, comme ils le disent si amoureusement : « le mille-feuille du papier toilette », plus cher que le bouquin grand format, mais peut-être moins que l’EDITION COLLECTOR, seule la couverture change. Pour faire beau sur l’étagère).
JF K.


Points à revoir :


Changer le nom des personnages.
Penser à ces personnages comme de vraies personnes, pas caricaturées mais crédibles, avec leurs défauts et leurs qualités. Leur part d’irrationalité.
Arrêter de tout rendre beau.
Rien n’est noir ou blanc, le monde est rempli de nuances. (surtout les gens)
Leur parcours est un beaucoup trop facile, à aucun moment ils ne trébuchent ou font demi-tour (ou alors c’est un mal pour un bien). Ce n’est pas comme ça dans la réalité.
Ne pas développer ce qui n’est pas intéressant.
Les personnages ont une personnalité, ils n’agissent pas comme n’importe qui le ferait.
Arrêter de bouger. Rester à un endroit.
Mettre de l’action au lieu de raconter ce qu’un mort a fait de sa vie.

JeanneFlamby
2
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le 22 nov. 2019

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