Un homme qui dort par Elsahaha
Comment dire que je l'aime ?
Ce livre, c'est un peu moi. C'est la réalisation du désir sourd que l'on peut ressentir lorsque l'on s'ennuie, lorsque le monde est trop ou trop peu, trop petit ou trop grand : s'échapper, cesser d'exister. Être ailleurs.
C'est le fantasme du rêveur qui cherche à ressentir pleinement ce qu'est la vie en se détachant de la vie : vivre une expérience unique, se priver de tout, se défaire des habitudes habituelles en se créant une routine banalisée. C'est paradoxal mais ça ne l'est pas : en réduisant au strict minimum les points d'accroche du monde extérieur, c'est une potentialité de découverte de son monde intérieur que s'offre le narrateur. Pour aller chercher ses limites et se découvrir, il expérimente sur lui-même pour mieux observer autour, en tentant de s'arracher au monde - pour mieux y trouver sa place ? -.
Le bourdonnement lancinant qui submerge l'adaptation cinématographique est un écho à ces retours cycliques, ces phrases rondes et laconiques qui rendent compte, un peu, du sentiment éprouvé par un rat qui serait enfermé dans une pièce circulaire aux parois ultra-lisses, toujours condamné à en revenir au même point.
Et cette fin, l'aveu, un peu comme dans "Into the wild" : tout ceci n'était qu'illusion et n'était pas la vie, tout ceci n'a pas changé ta vie, tu as échoué dans cette tâche impossible. Tu es humain. Et la fuite est vaine.