Un bouquin assez curieux, puisqu'il a tout de l'œuvre de jeunesse sans pour autant en être une. Après un début assez poussif, l'histoire des deux êtres marginaux qu'une force supérieure réunit pour satisfaire ses bas instincts prend des airs de fable morale assez consensuelle.
Silverberg apparaît ici comme l'anti-Asimov : brillant pour dépeindre le tréfonds de l'âme humaine - contrairement au second dont les personnages ont souvent tendance à se réduire à des clichés -, son traitement des aspects purement science-fictionnels laisse en revanche dubitatif.
Le texte est ainsi parsemé de trouvailles SF qui n'apportent pas grand chose au récit même quand elles sont convaincantes. D'autres font vraiment branleur, à l'image de cette description d'orchestre : "Il y avait des instruments à cordes, des instruments à vent, une section de percussions avec, par-ci, par-là, quelques instruments extraterrestres très appréciés des orchestres modernes." Ou comment donner l'impression qu'on vient de se souvenir en plein milieu d'une phrase qu'on est en train de faire un roman de SF.
Reste donc le traitement des personnages, avec au premier plan ces deux êtres faits et réunis pour souffrir. C'est encore là que l'auteur a le plus de choses à dire, plongeant le lecteur dans leur ressenti et leurs névroses. On aurai aimé retrouver une telle profondeur chez le sadique Duncan Chalk, mais force est de constater que son personnage se réduit surtout à une fonction, alors que ses sous-fifres sont plutôt réussis.
On pourrait sans doute ajouter que c'est un peu court, mais l'œuvre est un peu trop mineure pour justifier une tonne de pages en plus.