Un prince de la bohème est une nouvelle de Balzac, consistant essentiellement en un long portrait d'un de ces jeunes vingtenaires qui composent, dans la Comédie Humaine, la grande cour des pas tout à fait parvenus de Paris.
La Palférine, dernier héritier d'une famille de nobles Italiens en exil s'étant illustrée à travers divers expéditions aventureuses à la cour de France ou de Naples, commet mille tours à Paris, entre bons mots et échappées à ses créanciers. Il se joue de Claudine, une épouse de bourgeois à la fortune incertaine qui s'éprend de lui, et lui demandera la lune pour essayer de la décourager. Le problème, c'est que cette dernière semble bien prête à aller la décrocher pour l'homme dont elle est passionnément amoureuse.
Un prince de la bohème est une œuvre étrange. Elle démarre comme un long portrait en forme de déclaration d'amour à un XVIIIe fantasmé, qui semble ne jamais devoir vraiment s'arrêter, avec tous les éléments topiques attendus : on suit la biographie d'un jeune chevalier, beau et impertinent, qui semble naviguer de coups d'épée en comportements libertins et licencieux, quelque part entre un prince de ligne désargenté et un ersatz de Casanova, ou un personnage de Murger. Imperceptiblement, les rôles s'inversent et on découvre bientôt l'énergie souterraine qui anime la « victime » de La Palférine, donc la force implacable déclenchée par son désir lui permettra de renverser les obstacles dressés par son bien misérable prince de gargote, et de traverser jusqu'en haut la société remuante de l'aprés-Juillet.
On retombe donc sur du déjà souvent vu chez Balzac – la théorie énergétique de la passion, la société XIXe poreuse aux manipulations, une certaine vision de la femme conquérante – mais la transition d'une époque à l'autre au sein d'une intrigue résumée en portraits est assez habile.
Bien fichu.