Au fil de ses livres et du temps qui passe, Anne Wiazemsky se livre : sa jeunesse, ses amours, sa famille, sa vie publique (actrice puis romancière). Et cela fait des années que cela dure, depuis ses tous premiers livres, il y a près de trente ans. Impudeur et/ou égocentrisme ? On peut accuser Anne de tout mais certainement pas de cela. Ce qui fait le prix de ses "romans" c'est la délicatesse et la réserve dans ce que l'on prend pour des bribes d'autobiographie successives mais qui, après tout, contiennent peut-être un peu de fiction et cachent sans doute des éléments qui n'ont pas vocation à être dévoilés. Après des personnages de l'envergure de Bresson et de Godard, deux cinéastes, Anne Wiazemsky s'attache, dans Un saint homme, à décrire un prêtre, et professeur de français, le père Deau, qu'elle côtoya d'abord à Caracas, pendant son adolescence, et qui renoua avec elle lorsque celle-ci commença à se faire connaître comme auteure. C'est d'une affinité élective dont parle Anne Wiazemsky, d'une amitié avec éclipses et même d'un amour au sens le plus pur du terme et sans arrière-pensée aucune, la rencontre de deux belles âmes. Une relation d'autant plus précieuse pour la narratrice que sa vie n'est pas alors très simple, sentimentalement et au sein de sa famille, notamment (rappelons qu'elle est la petite-fille de François Mauriac). Le père Deau est une sorte de guide dans la tourmente, présent quand c'est nécessaire, mais le plus souvent en pointillés car les deux ne vivent pas dans la même ville et ne cherchent aps à ce que leur vie empiète sur celle de l'autre. Et surtout, surtout, au moment où Anne Wiazemsky commence à être reconnue comme romancière, elle est fidèlement accompagnée dans cette nouvelle notoriété par cette homme de foi, dans lequel elle ne recherche pourtant pas la spiritualité, alors même qu'elle est vouée aux gémonies par une famille qui supporte mal d'être décrite sans fard dans ses premiers livres. Ce n'est pas toujours écrit explicitement mais l'on sent bien que Anne est alors une femme qui doute et qui souffre, il lui faudrait peu pour dérailler. Le père Deau, qui fut le premier à l'encourager à écrire , dans sa jeunesse vénézuélienne, est encore là plus de 2 décennies plus tard à la soutenir et à lui témoigner son affection sans la juger d'aucune façon. Un ange tutélaire, ce "Saint homme", pour un livre dont le plus grand défaut est la brièveté.