Un livre court qui retrace l'histoire de la grève bientôt centenaire (1924) des ouvrières sardinières de Douarnenez, comme une façon d'en prolonger l'histoire, puisque cette grève a été chroniquée à plusieurs reprises, mais que personne n'avait pris le relai depuis plusieurs décennies. Le titre du bouquin est d'ailleurs emprunté à première évocation écrite de la grève des Penn sardin, rédigée dès 1925 par la militante communiste et féministe Lucie Colliard, qui se rendit sur place pour soutenir les grévistes, et dont des passages figurent dans l'ouvrage d'Anne Crignon.

La narration est simple et factuelle, avec bien sur un parti-pris favorable aux grévistes (le livre est paru aux éditions Libertalia), ce dont l'autrice ne se cache aucunement dans sa préface. Après une description des conditions de vie (épouvantables) de ces ouvrières (le métier était totalement féminisé), vient la chronique de la grève, déclenchée comme souvent sur un fait particulier, ici le mépris d'un contremaitre refusant de recevoir des ouvrières qui venaient demander une augmentation. La grève durera plus d'un mois et demi et sera gagnante, malgré le refus des employeurs de négocier quoique ce soit au départ. Curieusement d'ailleurs, le préfet de l'époque refusera d'envoyer la troupe pour mâter le mouvement en dépit des demandes insistantes du patronat. Qui du coup fera appel à une sorte de milice privée, milice dont une bavure commise par une barbouze avinée retournera la situation en faveur des ouvrières. Même si l'auteur de la bavure sera relaxée par la justice et ses commanditaires jamais inquiétés.

A la même époque d'ailleurs, Douarnenez avait élu le première maire communiste de France, qui évidemment apporta un soutien fort aux grévistes. Daniel Le Flanchec était son nom et il mourut à Ravensbruck, non sans avoir quelque peu dérapé du côté de Doriot dans les années 30. Voilà qui j'espère pourra convaincre certains que la réputations de bigots réactionnaires des bretons est injustifiée. D'ailleurs, Douarnenez n'a pas renoncé à sa tradition de ville rebelle et est actuellement le théâtre de nouvelles luttes, contre les croisiéristes qui prétendent y faire escale et pour le logement à prix abordables des habitants : comment souvent en Bretagne, la bourgeoisie parisienne achète de nombreuses résidences secondaires et le coût du logement est devenu inabordable pour les personnes qui vivent et travaillent sur place.

Marcus31
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le 3 déc. 2023

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