Pendant l'hiver 1939-1940, Barny et sa fille France vivent pauvrement dans un village alpin. Mme Sinant leur logeuse appartient à l'Armée du Salut. Imprégnée des Dix Commandements, elle élève à la dure ses quatre filles, issues de quatre pères différents. "Dieu est leur père !", affirme-t-elle. Barny donne des cours d'anglais et écrit une lettre quotidienne à son mari Chaïm Aronovitch.


Mobilisé dans l'armée française, Chaïm (ou Vim) retrouve sa famille en permission, mais reste étrangement indifférent à sa fille de trois ans, l'éloigne pour s'isoler avec sa femme. Il tombe malade, échoue à l'hôpital militaire, ordonne à Barny de placer France dans une maison d'enfants. Ainsi sa femme pourra lui rendre visite chaque jour ! A sa sortie, il refuse de récupérer France pendant ses trois jours de convalescence. Quel égoïsme d'enfant gâté !


Vim se sent persécuté comme apatride, Juif et communiste. Pessimiste, il confie à son épouse être inscrit sur une liste noire : "Ils auront ma peau." Il la surcharge de démarches pour être réformé. Un gendarme interdit à Barny - de nationalité belge - de se déplacer car aucun laissez passer n'est délivré aux étrangers. Passant outre, elle résiste et parvient à voir Chaïm à l'hôpital. Il lui reproche d'être venue ! Un robot sans cœur et sans âme... Enfin Vim repart à l'armée. Ouf !


Barny est sans cesse contrôlée. Un inspecteur de la Sûreté fouille ses affaires et la bombarde de questions. Elle rate ainsi son dernier car en ville et doit marcher quarante kilomètres pour regagner son village. Un télégramme lui apprend le décès de son mari. Elle enquête : est-ce un meurtre ou un accident ? Son acte de décès ne porte pas la mention "Mort pour la France". Un gendarme affirme qu'il n'a pas été exécuté. En ce cas la mention "Mort en lâche" est obligatoire. Grâce à ses multiples démarches, la veuve apprend du chef du régiment qu'un "coup de mousqueton porté à bout portant" a causé la mort.


Devenue ouvrière dans une fabrique de fermetures éclair, Barny endure le vacarme, le mal au dos, aux jambes et aux yeux. Obsédée par son père, France tombe malade, hurle, ce qui exaspère leur logeuse. Barny doit déménager à vélo par grand froid. La survie devient critique. Elle quitte l'usine, devenue trop lointaine, devient préceptrice d'une jeune fille, ouvrière à domicile, puis modèle à l'école d'art industriel. Chez elle le froid règne, le charbon et la nourriture manquent et Barny tombe malade.


Des souvenirs de Vim donnent un peu d'humanité au communiste intransigeant. Comment peut-on être heureux quand le prolétariat est malheureux ? Un camarade assure que Chaïm s'est suicidé avec son mousqueton. Est-ce la vérité ? Cela recoupe l'information du colonel et confirme nombre d'intuitions de Barny... Qui est notre conjoint ? Pourquoi aimons-nous ? Parce que nous présentons qu'il mourra jeune ? Et qu'un bonheur durable ne nous convient pas ? Barny réfléchit sur son lit en position prénatale : ""Vous vous étiez embourbés dans le bonheur, vous croupissiez dans l'amour" (...) "Tu n'étais plus que la femme d'un mari, tu étais devenue une moitié d'humain." Sa vie continue sans Vim, mais avec France.

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le 22 janv. 2021

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