Je découvre la plume d'Alain Damasio, qui est indéniablement féconde et inventive, pleine de fantaisie tout en employant (en inventant) le mot juste pour capter l'essence d'une réalité. Il me tarde à ce titre de lire ses romans car c'était une expérience de lecture "mélodieuse" ! Un vrai travail d'orfèvrerie par moment.
Vallée du silicium rassemble des chroniques sur la Silicon Valley, avec un angle technocritique qui me parle beaucoup. Je suis plutôt mitigée sur les déploiements poético philosophiques de son analyse car il m'a souvent semblé qu'il "enculait les mouches", pour le dire vulgairement. La forme est très belle, mais certaines phrases ont plus l'air d'avoir été ciselées pour la beauté du geste que pour faire sens. J'ai trouvé plusieurs développements assez prétentieux, comme si ça se donnait à peine la peine (allitération) d'être intelligible et que ça se contemplait en se répétant "ouhlala ce que je dis c'est très intelligent dis donc". J'ai passé ces paragraphes et suis tombée aussi sur des aphorismes qui m'ont marqués, et ont heureusement contrebalancé mon scepticisme.
Je suis globalement très en phase avec ce que dit Damasio, mais c'est dommage que l'écriture soit un peu boursouflée pour dire des choses convenues. Comme le veut la dure loi du temps qui file, plus je vieillis, plus je deviens réac, mais je m'en vante pas. Damasio lui est droit dans ses bottes et se donne en plus des allures de prédicateur. Ca peut agacer.
Heureusement, la nouvelle inédite de la fin, qui mélange domotique et fin du monde, était haletante : là, malgré les pistes un peu trop éparpillées du récit, j'ai compris le talent d'Alain Damasio pour la prose. Il me tarde de le lire dans ce qu'il sait faire de mieux maintenant.