"J'écris de chez les moches, pour les moches, les frigides, les mal baisées, les imbaisables, toutes les exclues du grand marché à la bonne meuf, aussi bien que pour les hommes qui n'ont pas envie d'être protecteurs, ceux qui voudraient l'être mais ne savent pas s'y prendre, ceux qui ne sont pas ambitieux, ni compétitifs, ni bien membrés."
Après avoir écrit de chez les moches pour les moches dans King Kong théorie, Despentes s'attaque à inventer un nouveau monde de moches, elle les réunit tou·te·s et nous les présente un·e par un·e.
Vernon Subutex est un paumé, c'est le pote de lycée qui chopait de la meuf et de la bonne beuh et qui voulait être dans l'underground de la ville, il a réussi mais maintenant il se retrouve dans une merde noire. Parce qu'en fait Vernon, c'est un fragile.
Il éprouve énormément de difficultés à se sortir les doigts Vernon, il préfère les faire glisser sur les filles chez qui il va squatter. Il ne parvient pas à dire les choses, il ne parvient pas à demander de l'aide, pardon, de l'argent à ses ami·e·s. C'est la détresse. Mais ce qu'il parvient à réaliser, c'est que tout le monde est dans un état de détresse plus ou moins avancé autour de lui. Tout le monde regrette le passé et/ou redoute l'avenir.
Despentes dépeint ici une troupe de marginaux, le Paris désenchanté de personnages qui vont devoir apprendre à s'accepter et faire l'effort d'aller vers les autres. C'est un roman de désapprentissage de l'individualisme crasse qui caractérise salement le XXIème siècle. C'est un roman salvateur, qui n'a pas peur du cru, du glauque, de la réalité. Bienvenue chez les loosers, les faux bobos, les pigistes nymphomanes, les actrices porno transgenre, les scénaristes ratés mais bien mariés, les gauchos sexistes. Bienvenue dans les clichés et contre-clichés de notre époque.