Vineland
7.5
Vineland

livre de Thomas Pynchon (1990)

alors que vous marchiez sur du sable, c'est de l'eau soudain, une vague plus entreprenante a submergé vos pieds, vous les voyez encore, un peu étranges, trop loin, comme des proches en visio deviennent des éloignés - dans un autre monde, sous l'eau comme ça, à travers le miroir de la surface toute écumeuse - et à peine compris ce qui s'est passé c'est déjà le ressac, sentez glisser sous vos talons ce sable qui semblait ferme, tassé, d'autant plus ferme qu'il était mouillé et écrasé. Cette sensation de sol qui se fait la malle grain par grain, de monde qui se dérobe en vous laissant croire en douce que c'est vous qui translatez : vous connaissez.

(ou bien :

une paille dans un cocktail ( du rhum, du bourbon, gin vodka, téquila ou mezcal mais probablement pas d'eau minérale, on en trouve peu dans le Vineland ) qui parait biaisée par la diffraction. Une phrase commence quelque part et continue ailleurs, sans qu'on sente quand on a dérivé, et on se découvre marchant vraisemblablement dans une réalité parallèle - sauf que c'est une irréalité parallèle, et encore, parallèle, pas sûr, on est dans les biais, le récit emprunte des déviations.

- mais cette diffraction, ce dérobement, ce n'est pas spécialement Vineland dîtes-vous (avec raison), c'est tout Pynchon. - Oui.

Alors Vineland :

du rock, de la pop, des marginaux dans un monde qui semble uniquement peuplé de marginaux (un monde de marges dans des marges dans des marges, déserté par les normaux, un monde pas orthonormé), des activistes, des dingues, des défunts qui continuent à vivre dans des villages-résidences, des flics pourris, Reagan et ses barbouzes, des ex, des vieux amis et des trahisons forcément, toujours, des revenants, et vous êtes perdu (mais tant mieux c'est le jeu), des moments démentiels, et des moments qui se la jouent facile, qui tirent sur la corde, (d'où le 7). Et une Fin pas inoubliable, pas indispensable : Pynchon, toujours meilleur dans les débuts.

Essayez en VO si vous lisez l'anglais, on n'est pas sûr de tout comprendre ( - quoique, en français non plus - ), mais, un peu comme chez Pratchett, le doute sied à Pynchon.

Ce glissement du sable entre les orteils, toujours...


(...et oui, je sais, une des parenthèses ne s'est pas refermée, c'est la vie.


moranc
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le 11 juin 2023

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