Vingt-quatre heures d'une femme sensible par Gwen21
Court roman épistolaire écrit par une femme de lettres française, spécimen suffisamment rare pour qu'on y prête attention.
Une quarantaine de lettres - la plupart fébrilement écrites par une amoureuse passionnée qui se croit trahie - nous dévoile une belle plume pleine de sensibilité - quoique parfois trop emphatique - ainsi qu'une connaissance approfondie de la nature humaine, et plus particulièrement du sentiment amoureux.
Cette peinture de la jalousie et de la passion que nous offre la princesse Constance de Salm a vraiment de quoi interpeller le lecteur, par sa force et son intensité mais aussi par son indéniable poésie.
Malgré tous ses atouts, ce récit ne m'aura touchée que très superficiellement. J'ai été dérangée par les emportements fougueux - parfois fantasques - de cette femme jalouse jusqu'à l'excès et qui, oubliant son éducation et son rang, perd totalement le contrôle de sa raison, de ses sentiments et de ses actes. La fièvre qu'elle met dans toutes ses pensées et dans toutes ses actions, en cette fatale journée où elle est sans nouvelle de l'être aimé, m'a semblé découler d'un esprit quelque peu instable, en tout cas fragilisé. Or j'ai eu du mal à concevoir que cette fragilité venait uniquement d'une méprise, du simple fait d'avoir vu son amant raccompagner une autre femme chez elle. Ce manque de confiance en l'amant, n'est-il pas en fin de compte un manque de confiance blâmable en la nature du sentiment que les lie ? A plusieurs reprises, cette jeune et jolie veuve fortunée, qui a vraiment tout pour être sûre d'elle, va chercher à se raccrocher au bon sens et à la justesse de sa raison mais sans pouvoir s'éviter la noyade dans le pathos ni la chute dans le ridicule. A mes yeux, la violence de sa passion est à rapprocher de l'hystérie ; j'ai souvent eu l'impression d'être en pleine tragédie racinienne sauf que, transposée dans un salon parisien du début du XIXème siècle, le tout a sonné assez faux à mes oreilles, et avant même de connaître le fin mot de l'histoire, j'en étais déjà à excuser l'amant et à lui trouver de réelles circonstances atténuantes dans le cas où son infidélité aurait été avérée.
***ALERTE SPOILER***
Enfin, un tel déploiement de passion, un romantisme si exacerbé, des sentiments si vifs et un désespoir si profond qu'il place sa victime au bord du tombeau, auraient bien mérité un autre sort qu'une happy end vivement tirée du chapeau.
Le mieux est encore de vous faire votre propre idée ; la lecture de ce roman vous prendra à peine deux heures.