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Je suis arrivé plusieurs fois devant Voyage… plein de bonne volonté culturelle, mais incapable de dépasser les quelques premières pages. Je me suis rendu compte, en avançant un peu, que je n'étais rebuté que par le cadre militaire des quelques cent premières pages, pièce de choix de cette littérature des tranchées dont on nous a tant rebattu les oreilles dans nos études secondaires. Une fois cet obstacle initial franchi, j'ai été captivé par l'énergie brute du roman, qui remue et tressaute sans cesse de dégoût envers soi-même et les autres, avec sa misanthropie un peu miteuse, à la Caraco. L'écriture, accélérée à l'extrême par son oralité, et en même temps souvent traînante et un peu nonchalante, a fait date — on comprend mieux pourquoi lorsqu'on pense que le roman est sorti à l'époque de la gloire littéraire d'un Mauriac, d'un Chardonne et compagnie.


Une citation : « Autant ne pas se faire d’illusion, les gens n’ont rien à se dire, ils ne se parlaient que de leurs peines à eux chacun, c’est entendu. Ils essaient de s’en débarrasser de leur peine, sur l’autre au moment de l’amour, mais alors ça ne marche pas et ils ont beau faire, ils la gardent tout entière leur peine […] C’est à cela que ça sert, à ça seulement, un homme, une grimace, qu’il met toute une vie à se confectionner, et encore qu’il arrive même pas toujours à la terminer tellement qu’elle est lourde et compliquée la grimace qu’il faudrait pour exprimer toute sa vraie âme sans rien perdre. »

Venantius
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le 8 août 2015

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Venantius

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