Il m'a fallu faire un intense effort pour réaliser que "Week-end à Zuydcoote" était bien le premier roman de Robert Merle tant son talent d'écrivain transparaît déjà dans chaque phrase. En fait, j'ai eu l'impression de lire du Steinbeck et je ne m'étonne pas que Robert Merle ait obtenu le Goncourt général à sa parution en 49.
Zuydcoote, Bray-Dunes... charmants ports de pêche entre Dunkerque et la frontière belge... Jolies villes de front de mer avec leurs villas bien soignées aux pignons biscornus et leurs cabines de plage bien alignées. Mais ça, c'était avant... Avant 1940, avant la retraite de l'armée franco-britannique, avant l'invasion allemande ; ça, c'était avant de devenir une nasse à crabes dans laquelle ont été enferrés soldats et artillerie.
Comme son titre l'indique, le récit se déroule sur deux jours, un samedi et un dimanche. Le lecteur fait connaissance avec un groupe de quatre soldats, quatre "copains" pris dans le flux désordonné de la retraite, avec un seul espoir, passer la Manche, et une seule certitude, bientôt mourir. Mourir là, sur le sable immaculé des plages, mitraillés par l'un des raids de la Luftwaffe.
"Week-end à Zuydcoote" retrace la tentative de survie de ces quatre hommes, Maillat, Pierson, Alexandre et Dhéry, maillons faibles d'une armée disloquée en fuite, acculée à la mer, sous le feu nourri du bombardement ennemi. Quatre existences enfermées dehors, sous une pluie d'acier.
J'ai beaucoup apprécié cette lecture, j'ai lu le roman d'une traite. Si par la suite Robert Merle développera davantage ses contextes, ses personnages sont quant à eux déjà bien campés, comme ils le seront dans toutes ses autres œuvres. Son premier roman a clairement annoncé la couleur d'un style talentueux et a prophétisé son parcours dans la cour des grands.