Wilderness
7.8
Wilderness

livre de Lance Weller ()

Une claque magistrale...un roman incroyable...une histoire poignante !

Par où commencer…cela fait déjà un petit moment que j’ai terminé cette lecture et je pensais tout naturellement qu’avec le temps je saurais trouver les mots pour vous en parler. L’émotion aurait due laisser place à une critique construite…c’était du moins ce que je pensais. Et bien non, cela ne s’est pas passé ainsi. J’ai encore du mal à poser des mots sur ce que j’ai ressenti durant ma lecture et sur ce que je ressens aujourd’hui en en parlant. Bouleversante…voilà ce qui résumerait peut-être le mieux ce livre, cette histoire. Et encore, ce n’est pas assez fort…Poignante ? Profondément humaine ? Sans doute, dans ses bons comme dans ses moins bons aspects… Alors je vais tenter de vous parler de tout cela, aussi maladroitement et imparfaitement que possible…


Nous débutons ce roman en 1965. Jane Dao Mong Pool nous apprend être la fille d’Abel. Glenn, son père adoptif lui a tout raconté de cet homme qu’elle n’a pas connu.


Débutent alors deux histoires : le présent et le passé d’Abel Truman qui s’enlacent, se cherchent, se trouvent, page après page.


En 1899, au bord de l’océan pacifique, au Nord Ouest des Etats Unis, la guerre de Sécession est terminée depuis 34 ans. Dans sa vieille cabane en bois flotté, sur une côté battue par les vents, nous rencontrons Abel, un vieil homme aux multiples cicatrices, visibles et invisibles…Il vit là, entouré par des forêts immenses et sauvages avec son chien Buster. Un vieux cabot aussi laid que gentil qu’il rabroue affectueusement et qui lui ressemble fort. Lorsque deux ignobles personnages le laissent pour mort et lui dérobent son chien, il partira le sauver. Débute alors un voyage dans les méandres de son passé.



  1. La guerre de Sécession oppose deux camps : d’une part les sudistes menés par Jefferson Davis, président des États confédérés, qui souhaitent conserver leurs esclaves et d’autre part les abolitionnistes, menés par Lincoln et plus communément appelés les Yankees qui se battent pour l’abolition de l’esclavage. Abel est en première ligne avec ses compagnons d’infortune. Il se bat du côté des sudistes non par conviction mais pas un malheureux coup du sort. Déjà meurtri par la vie, le voilà embarqué dans une guerre qui le dépasse.


Avec Abel, nous plongeons dans l’horreur, nous sommes confrontés à la guerre,à sa cruauté, nous ressentons la terreur, nous entendons les cris d’agonie provenant de toute part, les hurlements, nous sommes spectateurs de scènes épouvantables qui prennent aux tripes. Nous le suivons, sans mot dire, dans ce flot de souvenirs où se mêlent folie des hommes et beauté de la nature…Car bien que tourné principalement vers l’humain et les ravages dont il est capable, ce roman est également un hymne à la beauté de la nature dans tout ce qu’elle a de grandiose, d’onirique, de majestueux. C’est d’ailleurs cette incroyable opposition qui fait la force de ce roman : l’horreur de l’être humain face à la beauté divine de la nature.


Lance Weller n’écrit pas, il peint. Il est capable de nous décrire de la plus belle des plumes, le sifflement d’une balle qui transperce le corps ou le bruissement poétique des feuilles avec la même grâce. Il parvient sans peine à nous imager chaque détails avec une incroyable précision. La violence des scènes en est suffocante. Aussi horrible puissent être certains passages, nous ne pouvons les passer, nous ne pouvons pas détourner les yeux. L’insoutenable fait partie de ce roman et nous est indispensable pour percevoir dans son intégralité la force de cette histoire. La plume de Lance Weller est l’une des plus belles qu’il m’ait été donné de lire, d’une puissance narrative inoubliable.


Dans cette épopée bouleversante et d’une rare intensité, le lecteur rencontrera également des personnages profondément humains, dans tout ce que l’humanité a de complexe : capable du meilleur comme du pire.


A chaque page tournée, le lecteur sera confronté à la violence, la puissance et l’amertume qui transpirent de chaque mot. Et au milieu de tout cela, un homme et son chien comme constante…la détermination et l’amour qui peuvent pousser à affronter tous les dangers.


Rien ne laissait présager que j’aurais pu m’attacher à un personnage comme Abel. Il n’a rien d’un héros, il n’en a pas le charisme, ni le charme naturel, il n’est ni drôle, ni agréable. Il a sa part d’ombre et fait penser à un ermite un peu crasseux et pourtant, au fil de la lecture, le lecteur sent monter en lui un certains respect pour cet homme maladroit qui a été éprouvé plus que de raison. Le silence et le malaise, dans lesquels Abel se plonge lorsqu’il s’agit de raconter son histoire, cette pudeur, cette honte qu’il éprouve, le rendent particulièrement touchant. Ce soldat repenti prend aux tripes et son histoire, ses deux histoires, passée et présente, chavirent les cœurs.


Lance Weller touche, subjugue et émeut autant qu’il percute et entaille son lecteur…


En conclusion : J’ai vécu la guerre, j’ai parcouru des kilomètres dans ces forêts sauvages en compagnie d’Abel, j’ai eu peur, chaud, froid, j’ai eu faim, j’ai vu l’horreur, j’ai senti la chaire brûlée par l’impact, j’ai entendu les cris d’agonie, j’ai ressenti la douleur…j’ai vécu ce qu’il a vécu. J’ai compris sa détresse, sa solitude…j’ai percé sa carapace au fur et à mesure et ce que j’y ai découvert m’a émue aux larmes.


Lance Weller a écrit le roman d’une vie. S’il n’y en a qu’un alors ce sera celui-là. Un roman d‘une beauté sans nom. Cette beauté là, défigurée, boiteuse, chiffonnée par la vie, n’a rien de l’image lisse sous tout rapport que nous nous faisons de la beauté en général…cette beauté là est pure, véritable, imparfaite, burinée par la vie, la vraie. Elle est beauté, parce qu’elle est authenticité. Et c’est exactement ce qui touche.


Lisez ce livre, s'il vous plaît.

MonCoinLivresque
10

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Créée

le 27 mai 2019

Critique lue 180 fois

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