Zakuro, la grenade

25 ans après la disparition de son père, Tsuyoshi découvre qu’il est encore vivant alors que sa mère perd la mémoire. Il organise leurs retrouvailles.

L’écriture tout en retenue d’Aki Shimazaki apporte une poésie froide au récit d’une famille bouleversée par la guerre.

Pendant la 2nde guerre mondiale, une partie de l’armée japonaise a été faite prisonnière par les soviétiques et s’est vue contraindre au travail forcé en Sibérie. Il faudra presque 10 ans pour que les survivants de ces camps soient progressivement rapatriés au Japon.

La lettre du père est captivante et lève le voile sur un moment d’histoire que je ne connaissais pas. On y découvre l’attente des familles au Japon, la brutalité de la vie des prisonniers, qui mourraient de faim ou d’épuisement dans le froid ou sous la chaleur. La lettre raconte les expériences cruelles réalisées sur des japonais une fois morts de ces conditions de vie.

Dans ce livre court, lent et efficace, on suit par les yeux du fils la dureté de la vie d’une famille de l’après-guerre puis la découverte des années plus tard d’un père qu’on croyait disparu.

Par une drôle de coïncidence, le temps n’a pas eu de prise sur le père et la mère au moment des retrouvailles. Ces 25 années de séparation ont disparu. La femme a perdu de sa mémoire les 25 années d’absence. Le mari a vécu une demi-vie sous une autre identité depuis qu’il a tué H. Il y a une poésie touchante dans la rencontre de ces jeunes amoureux âgés.

Néanmoins, le style, immuable à travers un récit bouleversant, dessert parfois le livre et cantonne l’intensité de ces retrouvailles à des mots froids. Certaines histoires brûlent les mains de ceux qui les écrivent. Sortir ces histoires est une nécessité. Ici, ce n’est pas le cas. Le récit est beau mais une ombre de maîtrise et un soupçon de distance atténuent sa force.