Nouveau single de Calogero issu de son dernier album Les Feux d’artifice, et nouvelle envie de le gifler avec une planche pleine de clous rouillés. Non mais c’est bon, là, Calogero, je supporte plus de l’entendre à la radio.
On a déjà eu droit à la chanson larmoyante-et-insupportable « Un jour au mauvais endroit », où il récupérait sans remords un fait divers sordide pour nous vendre son disque, avec la même habileté que nos chers hommes et femmes politiques ont cherché à récupérer des électeurs sur les cadavres même pas refroidis de Sofiane et Kévin. On avait aussi eu droit à la chanson tout-aussi-larmoyante-et-insupportable sur le gamin qui a perdu sa maman, pour faire chialer la ménagère et l’adolescente en fleur qui courront acheter le disque. Le troisième single de son album est donc une chanson elle-aussi-tout-aussi-larmoyante-et-insupportable sur le thème de l’homosexualité. Et je trouve ça pathétique. Non par homophobie primaire (loin de là, bien au contraire), mais parce que Calogero est complètement à côté de la plaque.
Prenons par exemple l’interview de Calogero dans le Parisien, et cette magnifique petite phrase : « L’âge fait que je me sens plus fort pour aborder ce genre de chose. J’ai voulu me mettre dans la peau d’un homosexuel après avoir vu un documentaire où des gays se faisaient tabasser en Russie. Je n’aurais pas pu le faire à 30 ans ».
Mouais, OK. Je traduis pour ceux du fond de la classe : à 30 ans, en 2001 donc, Calogero ne se sentait pas de chanter ce genre de chanson. Faut dire qu’en 2001, c’était un sujet tabou : le PaCS avait été instauré deux ans auparavant, et l’homosexualité n’était dépénalisée que depuis 20 ans. Non, vraiment, faire une chanson aussi engagée, c’était trop craignos. Aznavour ne chantait que Comme ils disent depuis 30 ans, et Mecano chantait Une femme avec une femme que depuis 10 ans. Calogero n’a pas donc eu le courage d’être aussi subversif que Zazie (Adam et Yves), Renaud (Petit pédé) ou Linda Lemay (Les deux hommes)…
Quoi ? On me signale dans l’oreillette qu’aucune des cinq chansons citées n’étaient vraiment subversives à l’heure de leur sortie (bon, Aznavour, à la limite, et encore…). On me signale aussi que j’aurais pu facilement citer 25 ou 30 autres artistes français qui ont écrit des chansons sur ce thème de façon beaucoup plus fines que le texte moisi de Calogero (ah oui, j’en ai pas parlé de la finesse des paroles : écoutez la chanson et on en reparle) : Juliette, Nicolas Bacchus, Indochine, Michel Sardou (heu, non, oubliez ça, on va quand même pas mélanger Le rire du sergent aux autres, ça ferait tâche).
Non, en fait, notre ami Calo sous-entend clairement qu’à l’époque, il n’aurait pas eu les couilles de chanter l’homosexualité. Vous comprenez, faut pas froisser la ménagère de moins de 50 ans et l’adolescente pré-pubère qui composent une partie de son public.
Mais maintenant, en 2015, Calo se sent très courageux, parce que, oulala, attention, il s’engage dur là. Un engagement pareil pour une cause, attention, ça envoie du bois, et il a pas peur de dire des choses qui dérangent, non mais ! Il a quand même patiemment attendu la fin des débats sur le mariage pour tous. On sait jamais, au cas où il ait des fans qui sont aussi potes à Frigide Barjot, faudrait pas les vexer.
Et même le réalisateur du clip est dans le même ton. Dans une interview à Tétu (ce magazine hautement provocateur), il a déclaré : « Que les chaines me demandent de couper les scènes de baiser (entre garçons), elles verront ce que je leur répondrai ! ». Houlala, ça rigole plus, on n’a même pas peur de la vilaine censure ! Et même qu’on la défie ! Même pas peur !
Ah ? Mon oreillette me dit qu’en fait, plus aucune chaîne télé ne censure des scènes de baisers homosexuels depuis une quinzaine d’années… On en voit même dans Plus belle la vie. Et de mémoire, la première scène de baiser homo dans la publicité (milieu pourtant habituellement très traditionnaliste) date de 2008 ou 2009…
Mais donc, Calogero ne s’engagerait que sur des causes faciles, consensuelles, et uniquement une fois qu’il ne risque plus de froisser grand monde ? En gros, que quand c’est facile ? Ah ben ouais, en fait. J’appelle pas ça du courage, j’appelle ça de l’engagement de canapé.
Ou alors, la seule explication rationnelle, c’est que l’ami Calogero a envoyé ses testicules ans le passé avec une machine à voyager dans le temps, 40 ans en arrière. A une époque où être homo, c’était compliqué, c’était mal vu, c’était répréhensible, c’était tabou. Là, ses couilles se sont dit « il faut réagir, c’est inacceptable ». Et elles sont revenues en 2015, et Calogero s’est enfin senti le courage de chanter une vraie chanson engagée, subversive et revendicative.
Bref, Calo, contrairement à ce que tu dis en interview, t’as pas de courage, t’es pas à contre-courant, tu es pire qu’un mouton qui suit le mouvement, t'es juste un démago. Ton courage, il est resté bloqué 40 ans en arrière. Mais au moins, tu ne choqueras pas trop les gens qui achètent ton disque. C’est déjà ça. On attend avec impatience ta prochaine chanson qui militera pour le droit de vote des femmes, ou contre la peine de mort.