Parmi les merveilles de ce morceau d'Ellington, il y a la voix voilée qui arrive seulement à la septième minute, écartant les nappes de brume...
Alors qu'on s'était fait à l'idée d'un instrumental, qu'on s'était installé peu à peu dans cette idée...idée juste : cette belle voix toute en retenue ( voix de qui ? ) n'est qu'un des instruments - les cuivres qui la suivent le confirment.
c'est sans doute Yvonne Luanauze ( AK Eve Duke ) qu'on entend là, flottant sur les eaux, choisie par le grand duc parce que sa voix a justement, exactement, un timbre qui se fond parmi les instruments.
cette voix du milieu sépare les eaux d'avec les eaux, ouvre juste la voie pour notre passage
Un voyage de quinze minutes dans de chaudes brumes, sur une eau étale, ou paressent quelques alligators : une composition impavide, des musiciens tellement en place, tellement chez eux dans ce morceau qu'on ne les traitera pas d'interprètes, des surprises qui fendent calmement les écharpes bleues - on les voit arriver de loin, formes sans détails qui glissent très lentement vers nous, évidentes mais jamais attendues...
Une couleur tombée du ciel, juste là, pour nous, dans l'eau.
https://youtu.be/bZyVBVFnrm4?feature=shared