Full Metal Blackness

Introduction : L'évolution de Paint It Black dans l'inconscient collectif.

La vraie signification de Paint It Black a toujours été un sujet plus ou moins clivant, chacun y allant de sa propre interprétation. L’interprétation la plus populaire de cette chanson culte est la description d’un état d’esprit dépressif, qui semble être celui de quelqu’un qui a perdu sa bien-aimée. Cependant, quasiment vingt ans après sa sortie, ce hit a pris une nouvelle dimension qui reste aujourd’hui très ancrée dans l’inconscient collectif. Le responsable dans tout ça ? Tonton Kubrick, qui a utilisé la chanson des Stones à la fin de l’immense Full Metal Jacket. Désormais, Paint It Black est considéré comme un hymne anti-Guerre du Vietnam.

Analyse des paroles : La piste Vietnamienne.

It just happens every day (...) I see a line of cars
And they're all painted black
With flowers and my love
Both never to come back

On peut supposer que le point de vue est celui d’un soldat déprimé qui rentre chez lui, puisqu’il est mentionné qu’il a fait face à la mort de frères d’armes plusieurs reprises sur le front, ou d’êtres chers lorsqu’il revient dans son propre pays (une partie de la chanson se déroule lors d’un enterrement). Cette idée est également véhiculée par les couleurs récurrentes dans les paroles, par exemple, le narrateur veut que le rouge, qui symbolise l’amour et la vie dans une certaine mesure, devienne du noir, symbolisant la mort et le désespoir.

Maybe then, I'll fade away
And not have to face the facts
It's not easy facing up
When your whole world is black

De plus, on peut dire que le narrateur souffre de stress post-traumatique parce qu’il semble avoir des difficultés à se confronter à la réalité, se réfugier dans ce « monde noir » peut être un moyen pour lui de ne pas avoir à faire face à sa culpabilité concernant ce qu’il aurait pu commettre au Vietnam. Les mécanismes de la dépression et du PTSD nous sont ici présentés de manière assez simple et métaphorique.

I've seen people turn their heads
And quickly look away

Quand ils étaient de retour chez eux, les soldats qui ont combattu pendant la guerre du Vietnam n’ont pas été bien accueillis par leurs concitoyens, les anciens combattants se sentaient aliénés, mis au ban de la société. Ils sont souvent considérés comme des bêtes assoiffées de sang, contrairement aux vétérans de la Seconde Guerre Mondiale par exemple. Ce rejet du corps social favorise la spirale d'isolement dans laquelle beaucoup de soldats sombraient au retour de la guerre.

En bref, nous pouvons dire que la chanson traite de l’incapacité des soldats à se réhabituer à leur vie normale lorsqu’ils reviennent du Vietnam, car ils sont hantés par les traumas de la guerre.
Comme aucune référence à un pays, des personnages historiques ou des dates spécifiques n’est faite tout au long de la chanson, on peut dire que le public cible est assez large, le but de la chanson serait alors de faire comprendre aux citoyens du monde entier la mentalité des soldats qui ont subi les horreurs de la guerre.

Conclusion : Un grand "Protest Song" ?

En tant que "protest song", cette chanson est particulièrement efficace parce que le point de vue adopté donne une vision très pertinente de la guerre du Vietnam. En effet, cette immersion dans la psyché du narrateur permet de mieux comprendre l’état d’esprit des soldats lorsqu’ils reviennent dans leur pays et leurs relations avec d’autres personnes, qui sont gravement perturbées par la dépression nerveuse et les traumatismes. De ce fait, on peut facilement s’identifier au narrateur puisque sa vision du monde et ses sentiments sont partagés avec nous.
De plus, l’universalité et l’intemporalité de la chanson contribuent grandement à son efficacité puisque la situation représentée peut être appliquée à beaucoup de conflits, quel que soit l'époque. Puisque sa signification est profondément ancrée dans l’inconscient collectif, ce sera toujours un manifeste anti-guerre pour les générations futures, à moins que l’on découvre d’ici 20 ou 30 ans une nouvelle signification à cette chanson, si ça ce n’est pas la puissance des œuvres cultes…