Quelle batcata ! Mais à un point qu'elle en devient aussi fascinante à regarder qu'une chauve-souris agonisante sur le parking d'une usine désaffectée de Vancouver ! Mieux, la médiocrité de "Batwoman" est telle qu'elle permettrait presque de réévaluer qualitativement tous ses collègues de l'Arrowverse au rang de productions HBO, c'est dire l'ampleur du désastre !
En fait, même si l'intention est évidemment louable, l'héroïne en elle-même n'existe que pour de mauvaises raisons se résumant à un simple "Youhou, je suis la première super-héroïne gay à l'écran !" et, à part un trauma familial étiré jusqu'à plus soif, il n'y aura pour ainsi dire que ça afin de la caractériser (quand elle ne pleure pas sur son passé en combattant les criminels, Kate Kane est une militante de la cause qui partage son temps entre ouvrir un bar LGBT et fricoter avec les plus jolies représentantes de Gotham City).
Et ce n'est pas la plupart des personnages de son entourage qui sauveront la mise : père ridicule, demi-soeur irritante, amour de jeunesse fadasse et autres rejetons transparents de Lucius Fox ou d'Alfred Pennyworth seront inintéressants au possible et enlisés dans des développements les transformant en figures incapables d'évoluer autrement que par à-coups caricaturaux (enfin, quand elles évoluent...). Il faut dire qu'à l'instar d'une Ruby Rose qui erre d'épisode en épisode, l'oeil éteint, en ayant l'air de maudire son agent pour lui avoir fait accepter ce rôle-titre calamiteux, la quasi-totalité des autres acteurs ne fait même pas l'effort de se débattre avec le peu de matériau qu'on leur fournit. On en vient à se prendre de pitié pour certains, le malheureux Dougray Scott (papa Kane) crispe si fort sa mâchoire à chaque apparition qu'il paraît constamment contenir des hurlements de frustration sur le sort de sa carrière.
Seule exception notable à relever : Rachel Skarsten en nemesis de Batwoman. D'abord insupportable en Alice dont la démence se résume à singer Harley Quinn en citant du Lewis Carroll à tout bout de champ, la comédienne va ensuite réussir l'exploit de briller un minimum au fur et à mesure que "Batwoman" se focalisera sur la souffrance intérieure de son personnage. Certes, l'ensemble se fera au prix de circonvolutions scénaristiques improbables la concernant mais ce sera bien par l'intermédiaire de son brin de folie que la série tentera de s'extirper de sa nullité ambiante et débouchera ainsi sur quelques percées plus intéressantes (en gros, l'enfance d'Alice et les événements avant/après le crossover annuel de l'Arrowverse).
Toutefois, ce ne sera hélas clairement pas suffisant pour sauver "Batwoman" du naufrage artistique complet.
Dans un Gotham post-Batman de pacotille, la série se montrera tout bonnement incapable d'exploiter la mythologie/héritage de l'illustre homme chauve-souris. Et, quand elle le fera, ce ne sera que pour la dévoiler sous un angle ridicule à travers la pauvreté visuelle de son univers, des scènes d'action expédiées, quelques troisièmes couteaux de vilains utilisés dans des intrigues "méchant de la semaine" absolument consternantes, ou encore un déferlement d'allusions à la richesse d'un passé que "Batwoman" ne mériterait même pas d'évoquer.
Unique véritable grand nom maléfique à avoir un rôle important, Thomas Elliot/Hush deviendra le parfait symbole de l'opportunisme d'une série conçue sans génie : le vilain sera certes idéal pour incarner in fine toute la problématique de la construction/perte de l'identité au coeur de la saison mais l'utiliser sans la présence de Bruce Wayne/Batman tiendra juste de l'hérésie absolue si le but était un tant soit peu de rendre justice au personnage. Sans parler de son look ou de son écriture spécifique (quelle gêne dans les deux cas !), l'essence même de ce qui définit Hush en sortira trahie.
Seul le rebondissement final de cette première saison promettait enfin quelque chose de plus respectueux à son sujet mais, comme un coup du sort très ironique, un virus issu d'une chauve-souris aura écourté le tournage des aventures de sa plus affligeante représentante humaine. Un mal pour un bien car cet ultime twist était également l'annonce indirecte de l'arrivée prochaine d'un pilier de Gotham City, cela aura au moins pu permettre de retarder un futur massacre télévisuel... jusqu'à la prochaine saison 2.