Il y a 5 ans, je découvrais sans grande conviction la petite ville d'Albuquerque sans me douter une seule seconde qu'année après année, après des vacances bien méritées, je trépignerais d'impatience d'y remettre les pieds. Rien n'était gagné pourtant en découvrant ce père de famille, professeur de chimie d'une cinquantaine d'année, enfermé dans une vie bien rangée et pas forcément folichonne entre son travail et son fils handicapé. Un homme gentil et visiblement aussi agité qu'une mer d'huile, un bon gars quoi! Un bon gars sans histoire dans la routine d'une petite ville du Nouveau-Mexique. Un bon gars qui du jour au lendemain voit sa vie basculer à l'annonce d'un cancer du poumon. Et, comble de l'ironie, un non-fumeur! Non franchement, la vie de Walter White ne présageait vraiment plus rien d'excitant. A moins qu'il ne se décide à mettre sa famille à l'abri en utilisant le temps qu'il lui reste à vivre pour mettre ses compétences en chimie à la disposition d'une cause qui n'a rien de noble : la préparation de méthamphétamine.
Immédiatement apparentée à Weeds qui oeuvrait déjà depuis 3 ans sur une chaîne concurrente, Breaking Bad s'en démarque pourtant rapidement par son côté bien plus sombre et violent. Le monde qui s'ouvre devant notre prof de chimie et son acolyte Jesse (un ancien élève devenu petit dealer) va très vite les dépasser et les entraîner dans une spirale de machinations, de trahisons et de meurtres dans un univers où contrairement à l'adage, seuls les plus intelligents survivent.
Alors je ne ferais que confirmer ce que beaucoup disent déjà. Oui, la série est impeccablement écrite et filmée. Oui, les acteurs sont hypnotiques dans des personnages puissants et complexes, qu'ils soient récurrents (Bryan Cranston en Walter White, Aaron Paul en Jesse Pinkman) ou temporaires (Jonathan Banks dans le rôle de Mike et Giancarlo Esposito en Gus Frings). Oui la musique y est rare mais pourtant toujours si justement associée aux images. Oui, parfois la série parait lente mais elle n'en reste pas moins hypnotique et imprégnée de tension, l'exemple le plus parlant restant à mes yeux le premier épisode de la saison 4 en huit-clos. Oui, jusqu'à la fin, Vince Gilligan arrive à nous surprendre tout en nous délivrant une conclusion à ces 5 années en forme d'hommage à sa propre série et à ses personnages.
Mais, ce qui rend Breaking Bad vraiment unique, c'est avant tout son évolution. Son évolution à travers celle de son personnage principal qui n'a plus rien à voir avec l'homme qu'il était. Une originalité qui, si elle a non seulement bousculé le spectateur dans sa routine télévisuelle confortable faite de retrouvailles hebdomadaires avec des héros attachants mais sans surprises, donne envie de reprendre tout depuis le début lorsque l'ultime générique de fin commence. Un générique de fin durant lequel on a envie de dire merci à toute l'équipe de cette série qui ne nous aura jamais déçu et qui regroupe dans son dernier épisode tout ce qui a fait sa force.
Jusqu'à maintenant, The Wire trônait fièrement en tête de mon classement de série mais je pense qu'à partir d'aujourd'hui, si la comparaison n'est pas aisée, la série de David Simon vient de trouver un redoutable concurrent.