Alors là, attention les yeux. Je crois que je n'ai pas la moindre critique à émettre sur cette série.
Breaking Bad, c'est l'histoire d'un prof de chimie de 50 ans - Walter White - qui, apprenant qu'il a un cancer, et tombant par hasard sur élève à lui - Jesse - devenu dealer, lui propose de préparer des amphétamines pour mettre de l'argent de côté pour sa famille. Partant de là, ça aurait pu donner n'importe quoi, de la sitcom lourdingue au drama très "hebdomadaire" qui fait de la pseudo-science et se prend au sérieux. Au lieu de quoi, on obtient ceci : un bijou de réalisation, d'écriture, et de jeux d'acteurs.
Je crois que je n'ai jamais vu une écriture aussi riche sur une série. Chaque épisode, l'un après l'autre, piétine violemment toutes les conventions scénaristiques de la télé, et nous prend constamment de court. L'action survient quand elle survient, et jamais selon des exigences prévisibles telles "c'est la fin de l'épisode". Et quelques fois, l'on a droit à un épisode à huis clos sorti de derrière les fagots, comme ça. Alors, bien sûr, si l'écriture se limitait à transcender les codes, l'intérêt serait très limité, mais il se trouve en plus que les scénaristes parviennent à produire des histoires incroyablement bonnes, ce faisant. Les épisodes à huis clos sont brillants, les épisodes bourrés d'action sont haletants, la plupart des épisodes n'est résolument aucun des deux, et est tout aussi excellente.
Certains épisodes m'ont tout simplement asphyxié sur mon canapé tellement le suspense était insoutenable - et je me suis pourtant rodé à l'exercice, ayant vu tout Lost auparavant.
Ça, c'est pour la trame en elle-même. Mais l'écriture consiste également à produire un univers riche et stylisé, ainsi que de bons personnages, et là encore, aucune déception de la part de Breaking Bad. Je ne m'étendrai pas sur l'univers, qui est assez riche comme ça, mais presque tous les personnages sont absolument extra. Certains m'ont fait émettre des réserves en début de série, mais tous ont fait leurs preuves par la suite, et j'en retiens tout particulièrement quatre :
- Le personnage principal, Walter White, n'est pas loin d'être un mythe moderne à lui seul. Il a par ailleurs une évolution incroyable en l'espace de quatre saisons (!).
- Son beau-frère Hank, qui travaille aux Stups, fait partie de ceux sur lesquels j'avais des doutes dans la saison 1, mais s'est avéré génial. En plus de fonctionner régulièrement comme le "comic relief" de la série, il a vraiment gagné en épaisseur au fur et à mesure de celle-ci.
- L'avocat verreux Saul Goodman, idem. Génialement présenté par Jesse de la façon suivante : "In this businnes, we don't want a criminal lawyer, we want a ... *criminal* lawyer" ("Dans ce business, c'est pas un avocat criminel qu'il nous faut, c'est un avocat... *criminel*."), il fonctionne souvent comme un comic relief, mais surtout comme l'une des pièces de l'échiquier qui permettent la dynamique incroyable de la trame ; en étant là pour conseiller et aider Jesse et Walt à mesure qu'ils s'enfoncent dans leur mésaventure. Et, comme tous les personnages de la série, et bien qu'apparaissant seulement à partir de la moitié de la saison 2, il est multi-dimensionnel et formidablement fouillé.
- Gustavo Fring, je n'en parlerai pas tant que ça parce que bien qu'apparaissant tardivement, c'est un personnage absolument capital pour l'intrigue. Je me contenterai simplement de ceci : c'est peut-être, de tous, le personnage le plus électrisant que j'aie vu à la télé. Lui non plus n'est pas loin du mythe moderne.
Et de tout cela, je ne sais même pas si c'est l'écriture des personnages, le jeu des acteurs, ou les dialogues, qui est le plus efficace dans le rendu de ceux-ci. Car en plus de cela, tous les acteurs, sans exception, sont au moins impeccables, sinon carrément géniaux, et il en va de même pour les dialogues. Enfin, pour couronner le tout, la réalisation est tout simplement sublime : riche, précise et stylisée pour l'histoire, ponctuée de quelques touches contemplatives magnifiques à base de plans d'Albuquerque et du désert du Nouveau-Mexique de temps à autre.
En conclusion, Breaking Bad, entre son ambiguïté morale, ses personnages et trames exceptionnels, et sa réalisation absolument exemplaire, c'est à peu près LA série que je recommanderais à n'importe qui. Série que je considère comme parfaite, d'où la note que je lui accorde.