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Désolé, gros pavé, proportionnel à mon amour pour cette série sous-estimée.
Buffy contre les vampires, avec son titre (volontairement?) un peu ridicule et kitsch, est une série qui ressemble en apparence à beaucoup d'autres séries du genre fantastique pour ados et jeunes adultes, avec des personnages du même âge (Smallville, Roswell, Charmed, etc.).


Pourtant, dès la première scène, on comprend qu'elle se refuse de céder à tous les clichés : Un jeune homme accompagne une jeune blondinette dans un endroit obscur en pleine nuit. La fille a peur et lui demande si ils sont vraiment en sécurité. Le gars lui répond nonchalamment qu'il n'y a rien à craindre, personne ne peut les déranger... Alors la fille révèle son horrible visage de vampire, le mord et le tue.


Joss Whedon l'a dit, il voulait renverser le stéréotype du film d'horreur attendu et débile, où la fille blonde court terrifiée dans la ruelle sombre, poursuivie par le méchant. Et c'est l'immense force de la série, renverser tous les clichés, et ne jamais céder à la facilité. Buffy est très forte et pourrait soulever un camion, pourtant jamais elle ne fait étalage de sa force en dehors des combats (quelques très rares scènes, comme le fusil du chasseur bourrin, qu'elle tord) et elle reste une jeune fille post-ado, fragile, sensible et cool, gentille et drôle.
Buffy est sensée dégommer vampires et démons. Pourtant elle tombe amoureuse d'un vampire, se lie d'amitié avec un loup-garou, une sorcière, une ex-démone, couche avec un autre vampire, revient de la mort à moitié démon, etc.


Dans le lycée de Sunnydale, les "pom pom girls" et autres "capitaines de l'équipeé habituellement glorifiés dans la plupart des autres séries (coucou Smallville) passent dans BTVS pour des crétins... Et ça manque...
Un autre message de la série est que malgré toutes actions, tout le monde a droit à une chance. Une chance de devenir une superstar adulée de tous pour Jonathan, l'ignoré. Une chance de rédemption si tu le souhaites vraiment, comme pour les auteurs de crime Angel, Spike, Anya, Willow, Faith,... Le manichéisme, pourtant propre aux fictions américaines, est ainsi bien malmené dans BTVS. Comme l'illustrent aussi les dialogues Buffy-Riley de la saison 4 ("Tous les démons sont des bêtes sauvages qu'il faut éliminer Buffy" Et l'effarement de Buffy derrière...). Ou encore l'épisode Gingerbread où les citoyens, influencés par des soi-disant enfants-victimes de démons se mettent à brûler des sorcières, etc.


On suit ainsi une première saison avec des enjeux et des épisodes classiques (1 épisode 1 démon), mais qui pose d'entrée les repères de la série, aller à l'encontre des stéréotypes, l'auto-dérision et le décalage des drames vécus avec la légèreté des personnages, à la fois sympathiques, drôles, aux dialogues touchants, humains, et crédibles.
Une seconde et une troisième qui sont cultissimes, tant pratiquement chaque épisode est chargé en émotions. C'est l'apparition de Spike et Drusilla, couple mythique inoubliable dans "School Hard". C'est aussi un épisode poignant "Lie to me" sur des jeunes en souffrance qui semblent n'avoir plus d'autre choix que d’idolâtrer les vampires pour devenir des leurs. Des révélations sur le passé obscur de l'irréprochable Giles dans "The Dark Age". L'apparition d'une nouvelle tueuse dans "What's My Line". Buffy confrontée à sa propre violence après avoir tué un humain (en apparence) dans Ted. Angel, l'amour éternel de Buffy, qui perd son âme et devient un psychopathe (Innocence). Alex, le ringard du lycée, qui devient un sex-symbol (Un charme déroutant). Des épisodes dramatiques et poignants sur l'amour et la mort (de Jenny, le grand amour de Giles dans Passion, et le drame revécu à l'infini entre un élève et son enseignante dans La Soirée de Sadie Hawkins). L'apparition de Faith, la tueuse mauvaise,l'anti-Buffy dans Faith, Hope & Trick. Un épisode mythique, The Wisch, où Cordelia se retrouve dans un Sunnydale de cauchemar où l'espoir, en même temps que les personnages principaux de la série, est mort. Helpless où Buffy perd ses pouvoirs et doit affronter un vampire psychopathe terrifiant. The Zeppo, épisode où Alex, à priori le moins utile du groupe, a le rôle principal. Doppelgangland, avec la confrontation géniale entre Willow et son double vampirique. Earshot, où Buffy entend les pensées de tous au lycée.
Une quatrième et une cinquième à partir desquelles la série semble s'essouffler.
Bizarrement, quand la série sombre dans le classique (Buffy doit se sacrifier pour sauver le monde. Les discours "C'est le mal le plus dangereux que nous ayons affronter bla bla bla", etc.) je décroche, et regrette les débuts de la série, quand par exemple les personnages, lancés en plein discours hyper-dramatique et sérieux, étaient interrompus par une situation ridicule. Les débuts de la série m'avaient (malheureusement?) habitués à mieux.
Mais ces saisons comportent quand même de grands moments d'émotion aussi (Le retour de Spike, le mariage de Buffy, le mythique Hush, le retour de Faith et son "échange de corps" avec Buffy, la révélation du passé de Spike, sa déclaration à Buffy, la perte de la mère.
Une sixième qui semble revenir à sa qualité d'autrefois, avec des épisodes cultes où on s'amuse avec les personnages, tout comme les scénaristes (l'amnésie collective avec des personnages qui se réveillent avec des personnalités diamétralement opposées, le trio de ringards plus dangereux qu'ils en ont l'air, le décalage entre l'aspect fantastique et léger de la série avec les obligations dures et cruelles de la réalité : la difficulté de contrôler ses plaisirs avec les comportements auto-desructeurs de Willow et Buffy, la nécessité de faire un travail ingrat, mal payé et sans avenir pour subvenir en urgence à ses besoins, la perte de repère entre le quotidien et une autre réalité crédible, celle où Buffy serait en fait internée depuis le début et aurait tout imaginé, faisant référence au début de la série, où cet internement fut déjà évoqué, épisode mythique qui se termine sur un final inoubliable et glaçant. Bref, les épisodes de la saison 6 s'enchaînent sans qu'on s'ennuie, jusqu'à un des meilleurs finals de la série: le méchant de la saison ne sera pas celui qu'on attendait.
Et une septième très (trop?) classique, où le ton devient bizarrement un peu prétentieux et l'auto-dérision et l'humour viennent à manquer, malgré quelques bons moments (merci Andrew!).


BTVS est une série anti-cliché (comme une anti-Smallville) avec une autre grande force : l'humour. Ex : le groupe regarde des pom pom girls acclamer leur équipe de foot et dit "C'est moi, ou c'est vraiment ringard?" "D'habitude, quand c'est ringard, ça me fait rire. Là ça me laisse plutôt froid."


Harmony : "Spike ne peut même plus cueillir des fleurs!"
Le fameux geste du pieu dans Hush.
Spike : "T'es encore venu me pomper des informations?" Buffy:"Qu'est-ce que tu voulais que j'te pompe d'autre?... Ah ça j'en reviens pas de ce que je viens de dire là..."
Sans parler de toutes les situations improbables. Buffy qui taille la bavette pendant 1h avec le vampire qu'elle combattait. Jesse le vampire lancé en plein monologue hyper dramatique et qui crève comme une merde. L'apparition attendue et effrayante du démon d'Halloween, qui s'avère être pas plus grand qu'un schtroumpf. Buffy déguisée en XVIIIe siècle, qui s'évanouit en voyant des vampires. Toutes les filles de la ville folles dingues d'Alex. Les mères qui s'apprêtent à cramer leurs filles "On se fait une bouffe un de ces soirs? On s'appelle?". Angel mourant qui déclare sa flamme à Willow, elle "Il m'a prise pour Buffy!" Oz"Ah, toi aussi!..." Les adultes qui se comportent comme des ados dans "Band Candy". Le combat mythique entre Harmony et Alex. Les stiuations et dialogues complètement absurdes du trio de crétins (le combat au sabre laser en pleine scène inquiétante, Le "je veux toucher tes boules" de Jonathan à Warren, etc.). Bref je ne vais pas tous les énumérer tant la liste est longue. La série a un potentiel comique énorme, et une capacité d'auto-dérision remarquable.


La musique aussi n'est pas en reste. Privilégiant les belles chansons pop rock du Bronze aux mélodies envoûtantes et mélancoliques d'artistes pas ou peu connus, qui s'adaptent merveilleusement bien aux moments clés emplis d'émotion que vivent les personnages. Là où Smallville sortait dans ces moments-là des titres clichés et tubes du moment.


Enfin Buffy contre les vampires c'est un des personnages, peut-être le personnage, qui m'a le plus marqué toutes fictions confondus : Spike, vampire rebelle aux cheveux blonds platine presque aussi ancien et puissant qu'Angel, magistralement interprété par James Marsters, de sa première apparition à sa dernière, avec une cohérence incroyable. Aussi fort que maladroit, aussi courageux que sensible et intelligent. Son "Ah! Les mères!" quand il se fait frapper par la mère de Buffy dans le premier épisode où il apparaît Hard School, résonne étrangement avec un des derniers Lies My Parents Told Me et certainement le meilleur de la dernière saison, où on apprend le lien étrange et dur entre Spike et celle qui fut sa mère...


Donc BTVS est avant tout une série incroyablement humaine, beaucoup plus profonde et subtile qu'elle en a l'air et indispensable, même 20 ans après, à une époque où je me sens assailli de séries toutes plus ressemblantes et fades les unes que les autres, avec des personnages creux qui le sont tout autant. Cette série n'a vraiment pas la moyenne qu'elle mérite, et j'ai bien peur que cette moyenne soit due à certains, pleins d'a priori, qui jugent la série après avoir vu à peine 2-3 épisodes.

Sylveyrier
10
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le 13 juin 2020

Critique lue 670 fois

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Sylveyrier

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